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A l'ouest de l'ouest - Grande Nouvelle

Grande Nouvelle "A l'ouest de l'ouest" est une grande nouvelle mise en ligne par "Ancolies"..

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Pas dupe du calme régnant pour le moment dans la bourgade, Mike attendait à ce que Sam passe à l’action. Ce qu’il ignorait c’est le processus qu’il choisirait. Il surveillait discrètement Franck et la belle Lana, étonné lui-aussi de constater combien Franck avait si rapidement changé. D’être effacé et pâle, obéissant sans histoire au rigorisme de son clan, il  rayonnait dorénavant aux bras de la belle aventurière. Il se demandait si Franck, dans la fougue et l’inconscience de sa jeunesse, se doutait que Sam n’allait pas en rester là et préparait sa revanche. Les choses avaient évolué  entre les 2 tourtereaux et Lana acceptait maintenant que son jeune soupirant monte parfois avec elle dans sa chambre à l’hôtel. Cette information ne pouvait qu’accroître la fureur de Sam. « Prépare-toi petit, disait Mike à Steve, d’une façon ou d’une autre ça va tourner au grabuge ». En attendant il perpétrait sa routine, poker symbolique, fléchettes et entraînement régulier de Steve aux armes en lui demandant de garder l’œil bien ouvert. « Ça va péter mon garçon ! ».

 

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Sam se sentait prêt. Pourquoi attendre pour reconquérir son honneur ? Le soir suivant, tard il retourna au saloon pour la première fois depuis qu’il s’y était fait moucher. Il s’assura d’abord de l’absence de Mike. Lana et Franck occupaient leur table habituelle. Il s’en approcha, se campa sur ses 2 jambes le torse bien bombé et s’adressa à Franck : « Il est temps de régler nos comptes. 11 heures demain matin dans la grande rue si tu en as le courage. Ou alors tu disparais ». « Vous êtes fatigué de vivre Sam ? Vous jugez que vous en avez terminé avec ce que vous avez à faire dans ce bas-monde ? » rétorqua une nouvelle fois narquoisement Franck. « Est-ce bien nécessaire Sam ? » intervint Lana. « 11 heures » répéta Sam ignorant la belle. « Très bien, c’est vous qui l’aurez voulu, 11 heures c’est d’accord, répliqua Franck, Et maintenant ayez la politesse de nous laisser tranquilles cette dame et moi, nous avons à discuter de tout un tas de choses passionnantes. ». « Tu ne peux t’empêcher de faire ton malin, le gosse. On verra si tu seras aussi fringuant demain. Bonsoir Lana. » conclut Sam avant de se retirer. Une nouvelle fois, Joe le propriétaire du saloon pressa son jeune employé Bill d’aller prévenir sans attendre le marshal. « Damn ! dit celui-ci. Un duel. Au moins ce n’est pas la guerre des éleveurs que je craignais. Tu as bien dit 11 heures Bill ?». « C’est bien ça M’ ssieur Mike, c’est ce qu’ils ont dit ». « Très bien ! Retourne au saloon. Comme disent mes amis indiens, demain et un beau jour pour mourir ». 

 

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Ce soir-là, seule dans sa chambre, Lana avait un problème. Un gros problème. Une chose tout-à-fait inattendue s’était produite : à sa plus grande surprise, elle était petit à petit tombée amoureuse de Franck qui s’était révélé bien plus mûr qu’elle ne l’aurait cru, intelligent, drôle et charmeur lors de leurs soirées. Et, sans rentrer dans les détails, elle passait d’excellentes nuits en sa compagnie lorsque, dorénavant presque chaque soir, elle le laissait monter dans sa chambre à l’hôtel. Cette nuit elle lui avait déclaré qu’elle avait besoin de rester seule, qu’elle avait besoin de réfléchir. Franck n’avait pas protesté, sachant qu’il avait la vie devant lui pour passer tout son temps avec elle. Lana Turner amoureuse ? C’était bien la première fois qu’une telle chose lui arrivait et elle se découvrait une face d’elle-même qu’elle n’avait jamais envisagée, douée d’un sentiment tout nouveau pour elle, très excitant et agréable, avec les innombrables émotions que cela engendrait. Elle qui n’avait jusque-là que connut un cœur de pierre, une véritable mécanique à manipuler ses soupirants, découvrait une nouvelle Lana, tendre, ouverte à l’autre, émotive et sensible. Non, elle n’en croyait pas son propre cœur qui jusque-là n’avait fait que faire danser des pantins. Elle avait même été jusque déserter la séance de poker, impatiente de ces moments qu’ils passaient ensembles à leur table nocturne. Oui elle s’était plus qu’attachée à Franck, oui elle tenait très fortement à lui. Elle avait trébuché tête la première dans son propre piège et était affolée à l’idée de ce duel dont elle craignait terriblement l’issue. Sam n’était pas tombé de la dernière pluie et elle savait bien que, malgré sa tranquille assurance, son jeune amoureux était un novice. Toute la nuit elle réfléchit à la façon dont elle pourrait stopper cette confrontation mais au fond d’elle-même, elle connaissait trop bien les hommes et leur orgueil de mâles dominants du troupeau pour savoir que c’était impossible. Elle se maudit d’avoir créé de toutes pièces ce conflit dont maintenant elle savait qu’elle ne tirerait aucun profit, que ce soit Sam ou Franck qui l’emporte. Elle envisagea d’aller trouver Mike pour tenter de bouleverser le désordre de ce conflit qu’elle avait créé de toutes pièces mais renonça rapidement, sachant que cela ne mènerait à rien. Elle ressentait une angoisse jusqu’alors également inconnue et ne ferma pas l’œil de la nuit. 

 

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                                                    *          *

 

Naturellement, toute la ville était au courant et les hommes quittèrent leurs maisons pour se rendre au saloon en attendant les 11 heures fatidiques. C’était un jour particulièrement chaud et les notables essuyaient la sueur perlant à leurs fronts d’élégants mouchoirs brodés à leurs initiales tandis que les autres faisaient la même chose d’un revers de leurs manches de chemises de travail. Le clan Patterson se déplaça également et tous se tinrent groupés sous l’auvent du barbier, silencieux et la mine austère. Franck était arrivé tôt en ville pour prendre de fort bonne humeur un petit déjeuner avec Lana, laquelle tenta en vain de le dissuader de se battre. Franck haussa les épaules en riant, lui disant que désormais les jeux étaient faits et qu’elle s’inquiétait pour rien. Sam arriva pile à l’heure, le soleil presqu’au zénith. Il accrocha le licol de son cheval à la rambarde de la terrasse du saloon. Il était vêtu d’un élégant costume qui jurait avec son ceinturon. Franck lui-aussi s’était fait élégant, comme à chaque soirée passée avec Lana, jean neuf, bottes cirée et chemise blanche de toile. Les deux hommes se rejoignirent au centre de la grande rue pour se mettre une ultime fois d’accord. Mike déboula. « Eh les gars, j’ai dit pas de bagarre armée dans ma ville ». « C’est une affaire d’homme à homme Marshal, rétorqua Sam. Vous saviez bien que les choses ne peuvent en rester là, et nous sommes tous les deux d’accord ». « C’est exact Franck, vous êtes vraiment d’accord ? Vous réalisez ce que vous risquez ? » renchérit Mike. « C’est exact Marshal, nous sommes tous les deux d’accord » confirma Franck. « Donc c’est réellement ce que vous voulez tous les deux ? dit Mike, Sam, Franck ? ». « C’est vraiment ce que nous voulons, nous devons régler cette histoire Mike. L’un de nous est de trop ici et c’est un duel à la loyale » répondit Sam. Mike songea à s’interposer encore mais il avait compris que les choses étaient inéluctables. « Très bien les gars. A la loyale. Je laisserai tomber mon chapeau et vous dégainerez lorsqu’il touchera terre. Si l’un de vous s’avise de dégainer avant, je l’abats sans états d’âme, vous m’avez compris ? » conclut-il. « C’est tout-à-fait clair Marshal » conclut également Sam.

Ils firent ça comme dans la vieille Europe : ils se mirent dos à dos et d’éloignèrent chacun de 15 pas avant de se retourner et de s’observer. Lorsque le galure de Mike toucha terre ils firent feu simultanément. Franck s’écroula sur le sol de terre battue, une étoile comme une fleur pourpre éclosant lentement à la hauteur de sa poitrine sur sa chemise blanche. La population restait immobile, comme pétrifiée, tout comme Sam, tenant encore bêtement son 6 coups à la main. « Franck ! «  cria Jim se précipitant vers son frère étendu au sol. Il était trop tard, Franck était déjà mort. « Maudit soyez-vous ! » cria-t’il à l’intention de Sam, qui rengaina et haussa les épaules. Lana également se précipita vers le cadavre de Franck. Comme elle l’avait craint, la confrontation avait mal tourné pour son chéri et elle était bouleversée par l’issue du duel, son cœur d’acier saignant pour la première fois de son existence d’adulte. Mike s’approcha de Jim : « Je suis désolé Jim, je n’ai pas pu les empêcher de se battre ». « C’est ok Marshal, j’ai vu ce que vous aviez tenté de faire. Il aurait pu refuser de se battre, il a choisi comme un présomptueux. C’est cette femme qui lui a tourné la tête », répliqua Jim désignant Lana, laquelle, blême comme de la neige grise, garda la tête baissée et le silence. « Que voulez-vous qu’on fasse de lui Jim ? Désirez-vous qu’on l’enterre au cimetière de la ville ? » reprit Mike. « Non Marshal, dit Jim, nous le ramenons au ranch, chez nous, chez lui. Hé vous deux, cria t’il à l’intention de son clan, portez-le sur son cheval ». Deux hommes se détachèrent de sous l’auvent du barbier et s’approchèrent. « Allez-y doucement » ajouta Jim. Les deux hommes se saisirent précautionneusement de Franck l’un par les aisselles, l’autre par les pieds et le couchèrent sur le ventre en travers de la selle de son cheval également accroché par sa longe à la rambarde du saloon. Lors, l’un des hommes enfourcha sa monture et prit celle de Franck par la bride. Jim en tête, tout le clan Patterson remonta soit à cheval, soit en carriole et ils prirent lentement et sans qu’un mot soit prononcé la  route du sud. Discrètement Sam avait disparu.  « C’est fini Messieurs Dames, héla Mike à l’adresse de la foule. Rentrez chez vous maintenant ».

 

*          *          *          *  

 

                                                        *          *

 

La réputation de Sam n’en sortit guère grandie. Même s’il avait emporté le duel, il avait perdu sa dignité et son honneur et c’était irrémédiable. Il avait abattu un débutant et s’était conduit comme le premier idiot venu face à l’aventurière. Quelques-uns de ses cow-boys quittèrent le Cinq Trèfles - il fut contraint de recruter dans d’autres villes -, et les autres restèrent parce que d’une part ils avaient un bon travail et surtout par fidélité à La Pat’, Kathryn, laquelle avait remisé dans un tiroir sa volonté de quitter Sam, cependant qu’elle continuait de lui refuser sa porte et se montrait glaciale à son égard. Celui-ci se sentait honteux, méprisé par ses hommes, ne donnait plus ses ordres qu’à son contremaître et deux de ses lieutenants, évitant autant qu’il le pouvait le personnel du Cinq Trèfles. Il ne tenta pas de revoir Lana, qui aurait refusé de toute façon. Celle-ci quitta la ville comme elle y était arrivée, par la diligence, pas en conquérante cette fois mais la tête basse et le cœur empli de sentiments également nouveaux pour elle, sentiment de perte irrémédiable, chagrin du coeur dévasté et remord. Elle savait que sa vie en serait dorénavant bouleversée à jamais. Côté Patterson, une fois Franck enterré au ranch, le clan se replia sur lui-même, plus sévère et studieux que jamais. Quant à Mike, au fond de sa gorge il se sentait amer. Même s'il avait à maintes reprises connu des situations rudes, même s’il se disait qu’il avait fait ce qu’il devait, il se tenait en partie responsable du décès de Franck et en ressentait un profond malaise, lequel générait un stress qui n’améliorait pas son mal de dos. Il écrivit une lettre de démission au haut-commandement de l’armée et confia les clés de la petite ville au jeune Steve, lui assurant qu’il s’en tirerait très bien. Un beau matin, muni de son matériel, couverture de couchage, quelques ustensiles de cuisine, quelques provisions - café, sucre, quelques boîtes de fayots ainsi que des lamelles de viande séchée -, il enfourcha son magnifique et fidèle appaloosa et quitta tel Lana Lypstic River pour toujours. Pour une destination inconnue de tous, à commencer par lui-même. Désormais, même si le nombre d’habitants de la ville restait improbable, en y incluant Lana Turner, Lypstick River comptai 3 âmes de moins. 

 

 

 

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Auteur

Ancolies

31-08-2023

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