Femme Vata - Biographie & Autobiographie

03  les fayots

Il a de la mousse à raser sur l'oreille, bien sûr elle trouve ça touchant. Bien sûr elle veut lécher le flocon bleuté parfumé. Parfois elle ose des trucs mais pas cette fois. Elle imagine le goût sous sa langue.

Il a un fayot gros comme un asticot coincé entre deux chicots. Elle trouve ça craignos. Elle lui en veut, s'imagine lui expédier une bastos. Elle imagine aussi la suite, les questions de la police, la lente marche de la justice. Bon, elle opte plutôt pour un tour en albatros. Sans lui évidemment, à moins qu'il ne se brosse fissa les crocs.

Il a un poème sur le cœur mais manifestement ça sort pas. Elle propose un bon tour d'auto-tamponneuses pour débloquer tout ça, qu'il la crache sa valda, qu'on passe à la prochaine.

Il a le sourire facile et pleure pas souvent. Des fois ça l'exaspère, elle meurt d'envie de lui rentrer dedans. Le monde c'est n'importe quoi et il sourit pendant qu'elle est mal, qu'elle se tord invisiblement les mains. C'est rare qu'il sourit pas de tout. Et évidemment de ses propres souffrances à lui qui elle la mordent. Des fois c'est pas vrai comme elle voudrait l'étriper. En même temps elle aime bien. Elle trouve que ça lui va bien. Elle trouve que son sourire va bien avec tout.

Ça on peut pas dire, il est doué pour les situations à risque en général, et au quotidien en plus. Le pire c'est qu'il a déjà trouvé ce qu'il cherche. Ça la crève trop. Des fois elle arrive à lui en vouloir mais ça dure jamais longtemps. Parce qu'il continue de chercher et qu'il arrête pas de trouver ce con.

Il a de l'or en veux-tu en voilà. Quand il sort il le verse par poignées sans y penser, sauf à mesurer ses gestes pour pas effrayer ni éclabousser nos amis communs les gens. Elle préfère pas être là. Si loin si proche, pour elle c'est pas commode. Il lance des lignes que généralement il ramène tout de suite. Il ignore totalement la stratégie des casiers. Il considère qu'il est patient, peut-être magicien mais sûrement pas trésorier. Des fois elle comprend trop de quoi il parle.

Ça la déchire de le quitter mais elle sait bien quand c'est comme ça. De toute façon c'est toujours comme ça. Elle sait aussi comme les petites filles sont fortes, perdues et avisées. C'est normal, elle s'inquiète de lui. Lui envoie un sms Ça va t-y ? Ça vata ! il répond du tac au tac. Elle le déteste.

Ps : oui je sais, c’est un chapitre complaisant. Mais il me plaît.

04    les massages

Cette fois-ci, la faute à Frère Mal De Dos.

Que je vous explique. Vous pensez bien que pour être d’heureux amants clandestins, il faut gérer pile-poil le truc. Si tu fais ça comme un salaud, qui se fiche comme de sa première gigue de faire du mal aux copains, va te faire voir. Non non, opérons dans la dentelle les amis, je vous prie. Il s’agit de ne blesser personne, de ne mettre en cause personne. Il s’agit de se faire mutuellement et comme on peut du bien. Et tant mieux pour les gros malins qui y arrivent. A aimer bien.

Cet autant ambitieux que délicat objectif, aimer bien, requiert donc un certain doigté dans la configuration triangulaire qui nous concerne Femme vata et moi. Aussi inscrivons-nous régulièrement des épisodes pause dans la relation, sachant qu’il nous arrive régulièrement de flirter un peu trop avec les bornes.

Et puis, et puis la faute à Frère Mal De Dos. Là ça fait plusieurs semaines qu’on fait gaffe, qu’on lève judicieusement le pied relativement à certains horaires et activités. Qu’on se contente de se chanter et de se sourire la joie d’être ensemble. Amour Patience Rigolade ! on se dit en riant. Et voilà que les lombaires, les miennes de lombaires s’en mêlent, et les vertèbres, et la nuque bloquée, et les pointes barbelés tous les cinq cm² courant frénétiquement des épaules au bas du dos. Là, y’a plus à tortiller, faut qu’elle me masse. Comme elle le fait régulièrement d’ailleurs en d’autres périodes. Bon, là tout de suite, on est pas idiots, on sait ce qu’on risque alors qu’on est en phase pause, mais y’ a plus le choix : ou elle me masse ou je saute de douleur par la fenêtre. Raisonnablement on opte pour la première solution. Bien obligé pas vrai ?!

Pas besoin d’être Jérémie pour deviner le sort qui nous est promis (6 pts). Et ben oui, on trébuche, ô pas immédiatement, aux premiers effleurements, mais finalement le fait est : on trébuche.

Bon ! me direz-vous, c’est pas la fin du monde non ? De fil en anguille, tout ça se comprend.

Non en effet, y’ a pas mort d’homme. Mais faut voir la suite. La suite c’est que ça arrive trois semaines de suite.

Ouais, y’ a toujours pas mort d’hommes mais c’est pas une raison pour faire comme si de rien n’était, comme si on était exactement en accord avec ce qu’on avait décidé.

Infini effort, spèce de grand connard ! je hurle mâchant mon pouce dans la nuit. Tous les prétextes sont cons ! je me réponds super culpabilisé. Forcément, toutes ces engueulades internes finissent par me réveiller. Je me tape un yaourt, ça va mieux mais j'ai toujours un poing crispé à tout rompre d'un côté et chaque jointure de mon corps blanche de rage de l'autre. J'en prends un deuxième^, puis un troisième. Yaourts. J'arrose généreusement de lait. Yaho ça va mieux. Quasi calmé je retourne me coucher. Pour m'endormir je compte mes péchés. Plus rapide qu'une sorbetière dernière génération, je roupille vite fait comme un nouveau-né.

Bonne nuit Frère Flagelleur, mais on situe quand même pas bien ton histoire de culpabilité et de repentirs.

Une fois ça va. Accident bien naturel de parcours. Deux fois on va faire comme si de rien n'était mais en fait ça commence à bien faire. Trois fois tu déconnes.

A ce point ???

Ben ouais, c'est plus toi qui gouvernes mec. C'est plus toi qui fais trembler la terre. Mauvais ça !

Je comprends. Y s'est passé quoi après ça ?

Rien de spécial. On a continué comme avant et comme après, c'est à dire réguler l'affaire de façon à ce que chacun y gagne et personne n'y perde.

Bon ben tout le monde est content alors ?!

Mmmoui. Enfin, Frère Mal De Dos un peu moins sans doute.

Pourquoi ça ?

Ben, instruits par l’expérience, pour les massages, maintenant y’ a des périodes c’est carrément tintin. Alors des fois souvent, Frère Fou De Douleur se met à hurler qu'il voudrait qu'un rouleau-compresseur lui passe et repasse sur le dos, là tout d' suite.

Aïe !

D'autres fois, il dit qu'il voudrait que ce soit quatre grandes femmes brunes montées sur bottines à talons aiguilles qui longuement et lentement l'arpentent.

Aïe aïe aïe !

Comme tu dis ! Et même, il prétend avoir totalement dépassé le stade des barbelés. Il dit qu'il s'en fout maintenant, des nœuds barbelés, il dit qu'il sent même plus.

Pas marrant en effet, n'empêche y' a quand même un truc qu’on comprend pas bien dans votre affaire.

Ouais ?

Ben Fillette et toi, vous pouvez pas vous faire des massages tranquilles, histoire de soulager Frère Mal De Dos sans méthodiquement rameuter Frère et Sœur Libido ?

Nan on peut pas.

Allons !

Juré ! on a essayé mec, réussi parfois même si tu veux, mais faut être honnête, on tient pas la distance.

Et du coup c'est Pauvre vieux dos qu’écope, c'est ça ?

Pauvre vieux dos toi-même ! Tu dirais pas des trucs pareils si c'est à toi qu'elle les avait faits ses massages.

Si elle est si fortiche que ça, pourquoi tu nous l'envoies pas ?

Pervertir Fillette en vos saletés de médias, et puis quoi encore ?!!!