Fables satiriques
Fable
Un crapaud tout guilleret après sa journée sous la terre Vint se promener près d’un plan d’eau quand vint le soir C’était là son habitude il admirait tant les fleurs ivoires Elles riaient de cet admirateur transi sans jamais être amère Sieur le Crapaud s’installait sur les grandes feuilles en surface Il observait la nuit, sûr de trouver bientôt un ver ou une limace Il se disait : « C’est le meilleur endroit ! », assis tel un empereur Les nénuphars aimaient cet amphibien si laid mais au grand...
Fable
Un jour le Grand Aigle prit la décision « J'inspire tant de jolies choses, il en va de ma réputation ! » « Faut qu’on m'admire, à tout prix qu’on me dise : Pas de plus grand talent voilà qui est de mise ! » Oui, mais voilà, non loin de là, chantait Ziozio Ziozio c’est le joli nom en argot pour Moineau Lui, il est tout simple, sans atour, rien de particulier Tout ce qu’il veut, c’est bien de progresser, il est si familier ! Chaque matin, chaque soir, il chante comme il peut Tantôt la poésie, ...
Fable
Surplombant la rivière, l’oiseau ouvrit les ailes Il habillait le ciel de couleurs éclatantes "C’est son tout premier vol !" , dit sa mère de plus belle Elle avait envers lui de très grandes attentes Le jeune martin pêcheur la regardait, craintif "Lance-toi", lui dit-elle, "ne crains rien, sois confiant De tes peurs souviens-toi mais n'en sois pas captif Utilise l’énergie des courants ascendants Puis descends vers les eaux, dis bonjour au héron Rends visite au col-vert et à la blanche aigret...
Fable
C'était un beau soir d'été, dans la basse-cour, Heure de joie et de fête en ce divin jour. Les coqs sans nulle trêve, à tue-tête chantaient, Les poules entre amies à la couve caquetaient, De la venue du grand, du majestueux pan, Et de son plumet radieux couleur océan. Seigneur aviaire des volatiles et rapaces, Venait de par sa présence honorer la race, Du peuple picoreur, doté du déshonneur : Leurs ailes ne pouvaient défier l'apesanteur. Le souverain au plumage bien coloré, Se savait de ses ...
Fable
Simple Corbard, de son tronc descendu, Trainait de sa patte un laitage, Simple Reneau, par le bruit entendu, Lui tint un parfait bizutage : « Eh bien quel temps ! Mauvais Corbard, Que vous êtes vilain, quel horrible canard. » En vérité, si vos cris s’éloignent de cette peau, Vous régnez sur la vallée, en maître sot. De ce chant, le Corbard, retira peu d’émoi, Et pour cacher sa triste voix, Ferma son bec et du prédateur s’éloigna. Le Reneau, immobile, cria : « mauvais monsieur ! Apprenez qu’u...
Fable
Dans leur abri, cheminaient les insectes : Dorés et zébrés de noirs, aux ailes voilées. Ils pétrissaient la pâte, fruit de leur collecte, Dont le parfum printanier découlait du pré. Venait là, un bourdon, faux mais tâcheron, Il était grand, fort mais n'était que moucheron, Discret, distrait, trait d'esprit ouvrier, Ignoré des mouches de même métier. Volatile de l'ombre, privé de soleil, Éclairé que par la divine vie : le miel, Notre bourdon regrettait une lumière, Alors qu'il n'avait jamais ...
Fable
Il fut un temps ancien, dans les landes du Nord, Où défilait le grand chevalier Escanor. Il était grand, fort, et surpassait tous les hommes, Escanor l'Orgueilleux, c'est ainsi qu'on le nomme. De ceux qui rivalisaient, peu étaient d'égal, Aucun n'était digne, de brosser son cheval, Au travers des royaumes, il défilait sans fin. D'un regard bleu vif, d'un sourire hautain, Il remettait en place, dans le droit chemin, Chaque petit tenace qualifié de nain. Devant tant de gloire, devant tant de r...
Fable
En son humble palais, de ses rêves était proie, Le seigneur chat. De sa maison il était maitre, Sommet d'un vaste quartier où il était roi. Sa terre était troublée par la vermine traitre, qui partout pénétrait, à l'insu du pacha. Le pays était troublé par le peuple rat, qui venait au félin de ses griffes gratter, les richesses qui faisaient sa prospérité. Sans nulle gêne il avait établi sa niche, Dans le palais du seigneur chat ; maison si riche. Les chats inquiets, devant leur royaume inves...
Fable
Seigneur chien, garde noble du troupeau, A sa tâche occupé ne cherchait nul repos, Contre ses griffes et crocs carnassiers, Ni brute ni bretteur ne venait se frotter. Avec l'âge vint fatalement le malheur ; Ses crocs usés, se mirent à tomber, Son museau jadis si fiable, perdait sa vigueur, En cause au métier ses griffes furent émoussées. Ainsi vint la quête du digne successeur, Notre vieille peau chercha un molosse, Un guerrier rempli de courage et d'ardeur, Dont le sens du devoir écartait s...
Fable
On ne voit bien qu’avec le cœur Vertes prairies, savanes ou terres qui se craquellent La langue est vivante et y court l'alphabet Chaque lettre est différente, chacune est un appel À celles qui suivront selon le grand archet De toutes nos émotions, notre besoin d'écrire À celles qui bâtiront l'architecture du mot Composant, noires ou blanches, croches ou bien soupirs Poignante marche funèbre ou bien fervent tango Il est tant de non-dits dans tout ce qu'on écrit Que les lettres elles-mêmes ne ...
Fable
Un loup fort morose s'ennuyait Dans sa modeste chaumière Qui lui servait de logis Ses voyages étaient si longs Qu'il avait peu de répit Mais sa vie était si triste Qu'il lui fallut combler Cette lassitude Se procurant quelque plaisir Afin de combler ses désirs En tout bien tout honneur Et à son avantage Sur son grand destrier Il tenait la cadence Ce loup avait trois filles Jolies et intelligentes Joueuses et malines Il avait le cœur brise L’âme en peine Et décida de changer sa vie Profitant d...
Fable
Je suis un innocent qui vis dans la forêt ; Je me nourris de feuilles, de fruits et de pépins. Je chante la journée, la nuit je cours après Les renards, les serpents, les taupes et les lapins. J’ai rencontré un jour un vieil homme curieux ; Sa barbe était si longue qu’elle traînait par terre. Son visage épanoui, son regard silencieux Semblaient me regarder d’un air triste et sévère. Voulant mieux l’approcher pour faire connaissance, Je me mis à mimer « la danse de Saint-Guy ; » Devant mes con...
Fable
L’enfant et le glacier Remontant aux sources du fleuve de vie fertile, La végétation se raréfiait et se repliait sur elle-même. Elle réussissait péniblement à survivre entre deux rochers. La vie s’accrochait de toutes ses forces en ces lieux stériles. Escaladant, m’agrippant, je parvins à la divine source. Devant moi, un glacier entre deux craquements, sanglotait. Ses larmes formaient un ruisseau qui vers la vallée poursuivait sa course, Empruntant des chemins escarpés où poussait la vie. Ma...
Fable
Le roi des rats comprit que le temps était venu. Les hommes avaient déserté les villes sans prévenir, Pensant que là, en ces lieux pestilentiels, il n’y avait pas d’avenir. Alors les rats occupèrent sans vergogne toutes les rues, Semant désordres et infernales maladies, Festoyant dans les restaurants étoilés délabrés, Et profitant des spectacles d’opéra, assis sur les meilleurs sièges usagers. Ils trinquèrent au roi pour ces territoires conquis. Les hommes avaient fui dans les campagnes Pour ...
Fable
Dans l'aurore claire d'un frais matin d'automne, Quand l'herbe ploie sous son poids de perles d'argent, Le long d'une prairie traversée d'un charmant Ruisseau au cours tranquille, à l'onde qui frissonne, Un renard, la queue en panache, hume l'air Qui se réchauffe sous les rayons d'un soleil Blafard filtré par une brume sans pareil, Il cherche une proie que lui donnerait la terre. Il va, vient au gré de ses folles aventures, Selon ce que dame nature lui accorde. Mais en ce jour une forte odeur...
Fable
L’un se disait utile l’autre bien “éclairée” Ils se croisèrent un jour, ce fut inespéré. Car en se rencontrant pour la première fois, Ils voulaient tous les deux faire entendre leur voix. La luciole pimpante toisa d’un air hautain Le lombric circulant comme un long serpentin ; Le regardant à peine, elle garda ses distances Craignant qu’il ne lui fît une quelconque avance ! On peut aimer quelqu’un de beaucoup de manières, Par sa grâce apparente et sa douce lumière, Tant pis si l’on prétend n'...
Fable
Jeune lapereau, cesse tout ce zèle. Calme-toi, tends tes longues oreilles. L’histoire qui suit ne date pas de la veille. Pourtant tout y est presque pareil. Les lapins y courent déjà. Rêvant, s’amusant, foisonnant, etcetera. Mais des monstres sont pourtant là. Qui chassent, dévorent, et c’est comme ça. Pour les épier, jouer la sentinelle On nous confia nos longues oreilles. Et nous reconnaitre, dépassant vers le ciel Ou écouter, quel organe exceptionnel ! Mais parmi les monstres, le plus redo...
Fable
Un bûcheron, bel homme de son état, muscles saillants, moustache frisée Partit un beau matin d'automne, hache sur l'épaule, vers la forêt voisine, Dans le but respectable d'abattre un arbre pour en faire un meuble de cuisine Que sa chère et tendre moitié lui avait commandé l'été dernier. Sur le chemin, il aperçut au loin un sapin au tronc droit et énorme Ce sapin est magnifique, pensa-t' il, aucune branche ne le déforme. Arrivé au pied de l'arbre centenaire, il le toisa puis levant sa hache I...
Fable
En pleine forêt, un bel incendie Contre lequel luttait un colibri : Tout seul, il allait et venait encore Goutte d’eau au bec, belle métaphore Que faisaient tous les autres animaux ? Ils se traînaient, chacun d’eux, bien des maux, Des excuses ou quelques bonnes raisons Pour ne pas bouger de leur paillasson : Les fourmis avaient déjà fort à faire : Nourrir les larves dans la fourmilière. Les chenilles se sentaient impotentes : Ces bien jeunes larves étaient dans l’attente. Les pélicans ? C’es...
Fable
Le loup émancipé (subir ou choisir) Une scène fréquente et malgré tout tragique : Un loup est tourmenté dans sa propre famille, Constamment harcelé par un parent sadique Qu’il finit par quitter comme une vraie torpille Devenu un adulte il se décide à vivre, Choisir ses relations plutôt que les subir, Se recréer des liens qui toujours lui délivrent Un bonheur, une paix, le meilleur, non le pire. Il est des maux cachés, profondément enfouis, Dont la source se masque et montre un beau visage, Q...
Fable
Il était une fois un fabuleux pays Menacé par une vaste calamité Dont la cause est futile à notre récit Mais que tous ignoraient avec placidité Le royaume voisin, en ayant connaissance, Y envoya son plus rapide destrier Pour avertir l’allié en grande diligence ; Il choisit donc un jeune et léger messager Celui-ci arriva, disons-le, promptement Cependant personne ne crut à son discours : L’on dit bien que la valeur n’attend pas les ans, Mais à ses sottises puériles on coupa court… Le bon roi ...
Fable
Un moine bouddhiste réalise une fresque. De sable coloré, cet harmonieux lacis Est grand en précision car chaque grain, ou presque, Est un à un posé en grande minutie… Un touriste l’observe avec admiration Car jamais il n’a vu une beauté pareille. Sa surprise éclate quand, à la finition, Le moine se lève et son ouvrage il balaye ! « Mais que faites-vous donc ? Vous avez tout détruit ! - Oui. Car dès le départ je l’avais projeté Et sans mon action, le vent l’aurait fait aussi : Une fresque de ...
Fable
Pensées somnotoxiques du moustique Un vulgaire petit moustique S’agite et vole, survolté. Une pensée folle le pique : Il veut, sur le monde, influer Il réfléchit tant et si fort, Faisant un « dzzz » de tous les diables, Qu’il réveille l’homme qui dort, De son bruit si désagréable ! Vous croyez être trop petit Pour changer les choses ? Nenni ! Pensez au tout petit moustique Et à son bruit somnotoxique ! Car l’humain qui, le lendemain De cette chaude nuit d’été, Devait écrire son destin, Ne le ...
Fable
Avec ou sans coquille ? Un escargot qui portait sur son dos Sa belle maison, solide spirale, Croisa la limace à l’humide peau, Rampant toute nue, exposée au mal… Il se dit alors : « Je suis bienheureux : J’ai toujours sur moi une protection ! Si j’étais né sans, ce serait fâcheux ! Ma belle coquille, ma bénédiction ! » Une limace sans spires à son dos, Pouvant avancer, ramper lestement, Vit un escargot dont colle à la peau Une charge qu’il traîne lentement… Elle dit alors : « Je suis bienheu...
Fable
La grande fourmi reine, en entière empathie, Sentit l’intense famine des ouvrières Qui de la sécheresse estivale ont pâti. Elle s’exprima donc, en souveraine fière : « Mes ouvrières… Que dis-je ? Mes chères filles, Vous avez tant souffert, toutes dans vos quartiers. L’extrême rudesse de l’été vous titille, Mais soyez heureuses de votre beau métier ! Je vous l’affirme fort : pour vous ragaillardir, Gardez vos ambitions et restez bien « focus ». Non, votre implication ne doit jamais faillir : ...