Les zagazines - Pause-Café

Les zagazines

Conscients de leurs rôles ô combien fondamentaux pour ouvrir tout grand au grand public du grand parloir les grandes portes du grand dortoir, les zagazines regorgeaient à en vomir de zinepties. C’était le seul papier qui se vendait encore. Côté employeur c’était le paradis des plumes les plus racoleuses et les plus baveuses, œuvrant main dans la main avec leurs collègues paparazzis de la plus basse espèce qui soit, travaillant déguisés en touristes égarés dans des voitures banalisées ou guettant leurs proies juchés sur les plus hautes branches du plus proche peuplier de la résidence sécurisée. Côté consommateurs, les zagazines partaient, se vendaient, s’envolaient comme de petits panini premiers prix. Bien entendu nul nulle part n’utilisait le vocable "voyeurisme", il avait été depuis longtemps enfoui à la grande déculpabilité générale sous des tonnes de déchets radioactifs, non, on utilisait un truc qu’avait fait ses preuves en l’année 2022, on parlait d’opérations spéciales hebdomadaires. Sans que l’on n’ait le moins du monde besoin de leur sonner glas ou autres cloches, les gros zannonceurs étaient évidemment au rendez-vous des pleines pages et comme cela fonctionnait du feu de Dieu, les patrons se remplissaient goulument les poches sans guère à avoir se triturer la caboche. Quant aux starlettes et autres people affichés à la une et en articles 8 pages les montrant en petite tenue jouant au monopoly ou au scrabble à la plage, ils avaient beau jeu de faire mine de pester, écumer de rage et hurler en d’autres unes de zagazines concurrents à l’atteinte à la vie privée, en réalité et secret ils se frottaient dans l’intimité de leurs boudoirs parfumés leurs mains huileuses et cupides, aussi heureux qu’avides de palper l’attention générale de quelques côtés qu’ils se tournent. Et si en n’importe quelque endroit que cela fut, alea-jacta-sud-sud-est ou mords-moi-le-nord-ouest ou encore encore qu’importe, un quidam quelconque s’avisait de froncer ou hausser les sourcils murmurant en son chaume intérieur « Seigneur, que ma joie demeure mais dîtes-moi dans quel monde vivons-nous ? », il était aussitôt traité de pisse-froid, de rabat-joie, d’anarchiste renégat et sur le champ mené à Béthune et enfermé ad vitam aeternam dans le célèbre beffroi. Jeté sans ménagement dans l’immense cellule de pierre et de paille, il était immédiatement chaleureusement accueilli par ses frères jumeaux schizophrènes qui l’instruisaient sans attendre sur les quand et comment du chapelet des peines qu’il venait d’embrasser. Bref, en ces temps de démocratie unilatérale, mieux valait la fermer et s’abonner sans piper aux torchons sans attendre ni de dieu ni de diable absolument autre chose que que dalle. Tiens mon chienchien, disaient-ils, starlettes et baveux de zagazines aux centaines de millions d’habitants européens et étatsuniens de cette fichue planète, vite vite rapporte la baballe et lis les 48 pages centrales !