"Vol au-dessus d’un nid de chansons" est un texte mis en ligne par
"Ancolies"..
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Vol au-dessus d’un nid de chansons
La vie est un combat permanent pour un dépressif originel. Pas pour lui les rires faciles ou non, les charmes magiques qui accompagnent la jeunesse, la légèreté, l’insouciance. Non, vraiment pas une partie de plaisirs. Dans ses jeunes années, assommé de cachets prescrits par de gentils psys (entre autres antidépresseurs et régulateurs d’humeur, un cacheton pour préparer le sommeil, un autre pour dormir, un troisième pour préparer le réveil, et un tranxène 50 au petit déjeuner pour bien démarrer la journée), dans ses jeunes années donc le préposé soulève à l’aube une demie-paupière : Quoi ? est sa première pensée, Quoi ? Ça recommence ? Ça ose recommencer ?!! Evidemment et heureusement, avec le temps va où tout s’en va, il apprend à gérer, c’est moins dur, mais cela reste un combat quotidien. Ne pas baisser les bras. Je ne connais qu’une seule méthode, en tout cas c’est la mienne : travailler. Bosser. Certes, certains dans la population affectée ou non par des troubles psychiques ne font rien et s’en portent très bien, du moins le croient-ils, mais c’est rare. En gros, comment peut-on aller bien en ne faisant rien ? Je procrastine, tu procrastines, il procrastine, nous procrastinons vous procrastinez ils et elles procrastinent, on s’ bouge le cul, on se remue… Pour un dépressif les journées sont longues et il s’abreuve encore de cachetons pour que les nuits soient elles-aussi plus longues de façon à faire les journées plus courtes. Oui les journées sont longues aussi pour les pappys qui se couchent à 21 heures et se réveillent à 6. Ben oui Pappy, faut te coucher à 3 plombes du mat, comme les copains. Tu te réveilleras à 11 et tu verras, ça ira très bien. Et qu’est-ce que tu fais jusque 3 plombes du mat ? Bah, l’embarras du choix, du tricot, des réussites, des mots croisés, la discute avec l’autre handicapée, la putain de télé… C’est ça, regarde les infos en boucle, tu verras, tu ne seras pas du tout déprimé. Quoi d’autre ? Ah, t’en as marre de manger ? Je te comprends, c’est chiant. En plus on mange comme des porcs, 4 fois trop dans ce pays. En avant les grosses bedaines, laissez passer les confitures. Eh oui, ainsi est faite dans notre hexagone la nature. De Gaulles : « Comment peut-on gouverner un pays où il y a 280 sortes de fromages ? ». Les fromages c’est le chaos, la chienlit. Donc c’est de Gaulles et son unique rustique ou la chienlit. La chienlit a gagné. La chienlit gagne toujours. Mais non, c’est l’Amour qui gagne toujours, objecteront certains. Tant mieux pour eux, de grâce, j’aimerais bien être à leur place. Moi c’est tellement et tellement de dégoût que cela me pousse à l’indifférence. Beaucoup trop d’indifférence et je rejoins mon silence. Le silence qui a fini par devenir mon ami, mon grand ami. Non, pas mon grand tamis. Des tamis j’en ai pas. Pour tamiser quoi ou qui ? De la farine, de la Francine ? J’ai jamais acheté de farine de ma vie. Ni tué de chats d’ailleurs. Par contre récemment, j’ai effectué un geste historique dont on a parlé au jt : j’ai acheté des pommes de terre et du beurre. Première fois de ma vie. Question cuisson je ne suis pas encore vraiment au point. On s’en fiche, tête de pois chiche, qu’est-ce qui te fait croire que ta vie privée nous intéresse ? Mais on en a parlé au jt je vous dis, c’est donc bien historique. C’est ça, j’ai décidé de prendre un peu plus soin de moi, peut-être pour moi et sûrement pour mon fils. Arrêter de n’ingurgiter toujours que les mêmes sempiternelles salades industrielles et avaler des compléments alimentaires. On se lasse, c’est humain. Bah, on tirait bien la chasse de temps en temps histoire de se distraire, c’est pas un péché. Et puis peut-être qu’en fin de compte, alors qu’on était persuadé du contraire, on a finalement un peu peur de la mort quand elle se précise. Mourir, la belle affaire, mais vieillir ! chantait Brel. Papa est sans doute le plus beau mot de la langue française et vieillir certainement le plus moche. Abrapapabra, mon fils m’a sauvé plein de fois la mise. Plein de fois la vie. Ma graduation est celle-ci : 1 / mon fils ; 2 / ma création. Le reste, bof le reste. Mais mon fils habite loin et nous ne sommes guère téléphone, et ma création, ben ça va ça vient. Et si j’en ai pas ma dose, de création au quotidien, ben ça va pas terrible. Je m’ennuie et suis enfermé en moi-même. Qu’il est triste le temps, où l’homme devient sourd, à ses propres amours, à ses propres poèmes, où l’homme devient seul, enfermé en lui-même, enfermé en lui-même. Et aussi qu’il est triste le temps, où l’enfant devient grand, et quitte la maison, pour voler de ses ailes, ne laissant derrière lui, qu’une chambre endormie, qu’une chambre endormie. Encore une chanson à moi. Un jour un copain m’a demandé si je savais parler autrement qu’en chansons. Oui je peux, mais c’est moins bien. Les chansons ont des enfants plein la tête, c’est là leur avantage. Il en existe des millions. On peut parler de tout dans une chanson. Et de multiples manières. Les créateurs ne sont jamais au bout de leurs découvertes, sauf naturellement ceux qui se répètent. Dans leurs 2 ou 3 premiers albums, ils ont mis les 20 ou 25 années d’émotions qu’ils ont ressenties depuis leur naissance. Après ? Après quoi ? Ils ne trouvent plus d’inspiration que la vie quotidienne offre pourtant à foison pour qui sait observer, écouter et même donner. Mais c’est leur métier de faire des chansons, alors ils se répètent en moins bien ou alors noient l’auditeur dans une logorrhée verbale. C’est bien triste, et particulièrement pour des artistes que l’on aime Moi aussi je dois en sucrer des fraises, pourquoi échapperais-je à la règle. Je suis comme vous, orgueilleux malgré ma très sincère humilité, orgueilleux et humain. Humain : j’en ai commis de grosses sottises. Des bêtises plus grosses que moi. Pour ne pas les encaisser quotidiennement avec des chapelets de regrets, il faut que je me dise je suis humain. J’ai donc droit à l’erreur, à condition d’en tirer des leçons même si c’est long et que l’on retombe en chemin. Il faut identifier ses faiblesses et penser à fixer un prix plancher. Il faut penser à réfléchir. Quant à notre dépressif chronique, il lui faut penser à parfois sourire. Ce n’est pas naturel pour lui. Un grand galop n’y changerait rien. Le Mont Saint Michel le sait bien lui, lui qui sera bientôt submergé par les eaux, par le déferlement des flots. |
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Vol au-dessus d’un nid de chansons
appartient au recueil Nouvelles du monde
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