"Suite Française" est une critique de film, Théatre, série mise en ligne par
"Paulette Pairoy-Dupré"..
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Suite Française
« Suite Française » est un film de Saul Dibb, inspiré d’un roman d’Irène Némirovsky en cinq tomes. Irène Némirosvky fut déportée à Auschwitz en 1942 et n’en revint jamais. Son manuscrit retrouvé par l’une de ses filles, Denise Epstein, en 1998, fut publié et elle reçut le Prix Renaudot en 2004, à titre posthume. Le film semble rassembler les deux premiers tomes : « Tempête en Juin » et « Dolce ». C’est un récit de guerre vu par une femme, une chronique de la vie provinciale en période d’Occupation. Le titre est sans doute évocateur de ce qu’imagina l’auteur de la suite de la guerre en France, après 1942, date de sa déportation. L’arrivée du héro, ainsi que son départ sont introduits par une suite musicale qu’il a composée. Le début du film nous ramène en juin 1940 et nous plonge en plein exode des Parisiens, pour nous amener à Bussy, en Saône et Loire, village jusque là épargné par les bombardements et l’Occupation Allemande. Les images sont bouleversantes : gens de toutes strates sociales, fuyant vers le Sud, qui à pied, qui à vélo, qui en auto, en quête de davantage de paix, ou tout du moins de moins de misère, dans une grande débandade.
Les routes de campagne étaient sans doute fort chargées à cette époque, , mais la procession de ces êtres paniqués, chargés de leurs biens les plus précieux, est trop longue pour je pense, refléter l’exode et ne pas ressembler aux longues files d’attente des déportés aux approches des gares. Nul doute que l’auteur (et à son service, le réalisateur) aient souhaité évoquer là des moments de grande souffrance. Le film fait davantage l’objet du second roman « Dolce », la vie à Bussy en période d’Occupation. Lucile Angéllier, mariée par son père, peu avant sa mort, à un notable du village, qu’elle ne vit que deux fois avant que de l’épouser, lequel partit aussitôt à la guerre, pour y être bientôt prisonnier, mène avec sa belle mère revêche et acariâtre, une vie austère. La propriété est réquisitionnée pour y recevoir un officier allemand, Bruno Von Falk. Le prétexte littéraire et cinématographique est une idylle, impossible, défendue, qui se noue entre Lucile et l’officier allemand, tous deux épris de culture et de musique. Lucile joue du piano, Bruno von Falk est compositeur, d’une famille de militaire et n’ayant eu d’autre choix que de s’enrôler dans l’armée, en période de conflit. Les deux êtres s’attirent, se cherchent puis se trouvent dans le faux calme de la propriété. Aucun des deux n’est dupe ! Leur vie est inscrite dans leur histoire et celle de leur pays. Chacun doit défendre des valeurs auxquelles il n’adhère pas vraiment mais ils n’ont guère de choix. Ils sont prisonniers d’un contexte. Ce qui est plus intéressant, c’est ce qui se passe dans ce village, en apparence tranquille, où lors de l’arrivée des Allemands, le curé rappelle ses ouailles à la solidarité. De solidarité, nenni ! A commencer par le maire du village, remarquablement interprété par Lambert Wilson, le parfait « collabo » qui essaie d’acheter l’Occupant à des fins toutes personnelles, entre autre, ne pas être obligé d’héberger en son château, un officier. Mais cela n’est là qu’un détail sans doute. Nous sommes confrontés à un portrait psychologique féroce mais sans doute réaliste des Français en période d’Occupation : corruption, délation, profit, marché noir, haines, hypocrisie et égoïsme. On dénonce, on s’enrichit sur le dos des métayers, on les relègue dans des cabanes insalubres au fond des fermes qu’ils exploitent pour loger des familles de parisiens de qui l’on tire des sommes hallucinantes. Quant tout va mal, chacun pour soi et l’homme est un loup pour l’homme !
Ce film aurait pu s’appeler « Soumission » : - soumission d’une jeune femme à l’autorité de sa belle mère, - soumission d’un homme à son histoire familiale, - soumission des métayers à leurs propriétaires terriens, - soumission d’un peuple occupé, à l’Occupant, avec toutes les dérives dont l’homme est capable, de part et d’autre, - soumission à l’autorité militaire, - soumission à un contexte historique.
Et il y a l’Insoumis, Benoît, homme jeune, blessé, soi disant par une chute de cheval, qui se rebelle contre les conduites perverses des occupants mais aussi les abominations de ses concitoyens, tue un officier allemand tournant un peu trop autour de son épouse, fuit et se cache, mettant cependant en péril la vie des habitants du village. On peut regretter qu’une fois de plus, l’occupant ne soit présenté qu’au travers du Nazi barbare, alors que tous ne l’étaient pas. Un peu de moralité tout de même : le Commandant allemand un peu plus probe, écœuré des malversations du vicomte, maire de la ville, le fera exécuter en tant que responsable de ses administrés pour éviter que ne soient exécutés cinq citoyens non coupables du meurtre de l’officier allemand. Le personnage de Lucile évoluera de la niaise à la femme qui, par humanité, s’affirmera, déterminée, profitera des sentiments que lui portent l’officier allemand , prendra des risques pour faire fuir Benoit et optera pour des positions qui, on le suppose la mèneront à la Résistance. Kristin Scott Thomas excelle en première partie, dans le rôle de la belle mère bourgeoise odieuse style « Fol coche ». Matthias Schoenaerts entre dans la peau de Bruno von Falk avec une grande sensibilité pleine de sobriété.
Une histoire romanesque dans un tumulte de guerre parfois caricatural. |
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Suite Française
appartient au recueil I-Chroniques
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Critique de Film, Théatre, série... terminée ! Merci à Paulette Pairoy-Dupré. |
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