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Marina - Texte

Texte "Marina " est un texte détente mis en ligne par "Ancolies"..

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Marina

Le plus bel amour, le plus grand, le plus pur, le plus céleste qui soit, non ce n’est pas la première fois qu’on le fait, c’est la première fois qu’on le ressent en soi. On est un garçon, on a 8 ans, 9 ans, et une amoureuse, peut-être rencontrée dans une colonie de vacances de 3 semaines. Marina on va dire qu’elle s’appelle. Marina, quelle jolie musique. Il faut nommer les choses et les personnes et toujours se souvenir d’où l’on vient. Mais ça on est trop jeunes pour le savoir et s’en soucier. Mais ici on va être précis : Poiré, elle s’appelle Marina Poiré, c’est ça comme le comédien. Poiré là c’est pas très joli vous me direz mais on ne joue pas avec la vérité. Et puis il n’y a qu’à s’en tenir à Marina, c’est ça, on va faire ça, Marina. Retournons-y, on a 9 ans on a rencontré Marina. Là, elle comme lui, on a déjà le vertige, on devine, on pressent le grand abyme. Les étoiles nous appartiennent, la galaxie est à nous deux, les choses ne seront plus jamais comme avant. On a des rendez-vous secrets. Au coin d’une petite rue du petit village à côté du camp de la colo, dans une clairière du bois, dans l’herbe jaune d’une prairie... A ce coin de rue, dans ce bois, cette prairie, on profère des serments sans savoir que l’on ment, que bientôt ou tard on se parjurera. On s’enlace maladroitement, on s’embrasse sans glisser la langue et on ressent une nouvelle agréable sensation de frétillement dans son short. Perdus, perdus, non les baisers ne sont pas perdus. On ne pense pas encore à plus tard. Les amours d’enfance sont les plus purs. On est inconsciemment un peu inquiet également, une boule de peur quelque part dans le ventre. Mais la boule de feu est la plus forte, on ressent des sentiments nouveaux et doués d’une puissance jusqu’ici inconnue. Heureusement les parents ne nous ont pas fait lire la comtesse de Ségur, sinon on ne se toucherait pas. On n’aurait même pas l’idée de transgresser, on ignorerait ce verbe. Les jours du mois d’août se succèdent comme les rois succédaient aux rois dans les temps anciens et encore aujourd’hui dans quelques pays. Mais à partir du 15 de ce mois les jours commencent à raccourcir et l’obscurité tombe chaque soir un peu plus tôt. Là c’est une boule de cafard qu’on sent monter en soi : la fin de l’été, des vacances, l’impossible fin de Marina, l’horrible rentrée qui se profile. Marina je ne te reverrai pas. Promis juré on s’écrira. Tu habites au Luxembourg, moi à Paris on s’écrira. Mais on ne le fait pas, on est trop maladroits. Mais Marina reste gravée dans ton cœur pour toujours, ton premier amour. Toute ta vie tu te souviendras de ce prénom. Pas de ses traits non, ceux-là se sont vite effacés, mais la douceur de la musique de Marina restera. Bien au-delà de la prime jeunesse et même bien au-delà de la vieillesse. Lorsque l’on atteint la vieillesse, on rétrécit. 5 cms j’ai perdu, tassement des lombaires. Marina tu ne savais pas à l’époque qu’adulte, je mesurerai 1 m 85 et puis plus tard 1 m 80. Combien mesurions-nous à l’époque de cette colonie de vacances, à nos 8 ou 9 ans, 1 m 40 ? Combien mesuraient nos sentiments ? Autant qu’un grand auteur comme Victor Hugo, au moins 6 ou 8 mètres de haut. Que dis-je, 25 mètres alors ? Non, la Tour Eiffel,  l’Empire State Building. Marina avait de l’argent de poche, pas le garçon. C’est elle qui payait les petites friandises dont ils se régalaient lors de leurs rv secrets. Et si les monos les avaient surpris ? Eh bien sans doute ils auraient été punis, avec peut-être également l’interdiction de se voir. Mais ils étaient plus malins que les monos, ce qui n’était guère difficile, les dits monos n’en foutant pas une il faut le dire. Une fois, avec la colo, ils étaient allés à une fête foraine. Marina avait payé pour elle et lui un tour de grande roue et 2 barres de chocolat. Ô comme elles étaient douces ces barres de chocolat en plein ciel, comme ils paraissaient petits ceux restés au sol. Tandis que tous les 2 on se rapprochait du soleil. Marina tu as éclairé mon été. Mais pas que les 3 semaines de colo de ce simple été. Tu l’as éclairé jusqu’à ce que mon âme disparaisse, ce qui n’arrivera jamais. Tu vois, des années et des années ont passé, et je sais encore chanter ton prénom. Toujours il en sera ainsi, bien plus important que lorsque j’ai fait l’amour pour la première fois à 16 ans. Là tu vois, je ne me souviens même pas de son prénom. Ça ne comptait pas, c’est toi qui comptais. Marina jamais je ne te reconnaîtrai si les routes de nos vies se recroisaient. Eh oui, la vie, nos vies sont ainsi faîtes. Faîtes la fête pour votre premier amour, quand vous étiez gamin ou gamine. Quand vous ignoriez encore la corruption de l’existence. La duplicité et la cupidité des hommes. Leurs trahisons. Leur capacité au mensonge en commençant par leur propre miroir. Nous étions des enfants, nous n’étions pas cruels comme d’autres peuvent l’être, nous étions 2 rêveurs. Des rêves sortent de terre les plus belles cathédrales, s’élèvent les plus impressionnantes pyramides, des rêves naissent les plus extraordinaires inventions humaines. Mais aucune ne vaut l’émotion, la pureté immaculée de ces premiers émois que nous avons connus Marina, toi et moi, seuls au monde, seuls contre tous. Dans les herbes jaunes et vertes de notre prairie, dans les ombres et la mousse sur les troncs des arbres de notre petit bois. Le monde change, les coalitions politiques le disputent aux plus sombres manigances, la marée montante efface toutes traces des pas des amants sur le sable, mais rien n’atteint, rien ne défait ou détruit notre souvenir. Ce n’était qu’un brouillon diront certains. Non, c’était l’accomplissement de ce qu’il y a de meilleur en nous et que le plus souvent pour ne pas dire toujours nous perdons rapidement dans la suite de notre existence. Avec le temps va tout s’en va, chante Léa. Sauf toi et moi, Marina.   

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Ancolies

10-07-2024

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Marina appartient au recueil Nouvelles du monde

 

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