Connexion : supprimer Ou

L'art d'écrire - Domaine Public

Domaine Public "L'art d'écrire" est un texte du domaine public mis en ligne par "Boileau".Vous voulez partager avec la communauté de DPP, un texte appartenant au domaine public. C’est ici !
Chacun peut ressentir l'envie de faire découvrir les œuvres de certains auteurs.
Alors n'hésitez pas à le faire, les auteurs et textes à découvrir seront mentionnés sur votre profil.

Venez publier un texte du domaine public ! / Protéger un texte du domaine public

 

L’art d’écrire

Quelque sujet qu’on traite, ou plaisant, ou sublime,

Que toujours le bon sens s’accorde avec la rime :

L’un l’autre vainement ils semblent se haïr ;

La rime est une esclave et ne doit qu’obéir.

Lorsqu’à la bien chercher d’abord on s’évertue,

L’esprit de la trouver aisément s’habitue ;

Au joug de la raison sans peine elle fléchit

Et, loin de la gêner, la sert et l’enrichit.

Mais lorsqu’on la néglige, elle devient rebelle,

Et pour la rattraper le sens court après elle.

Aimez donc la raison : que toujours vos écrits

Empruntent d’elle seule et leur lustre et leur prix.

 

La plupart emportés d’une fougue insensée,

Toujours loin du droit sens vont chercher leur pensée :

Ils croiraient s’abaisser, dans leurs vers monstrueux,

S’ils pensaient ce qu’un autre a pu penser comme eux.

Évitons ces excès : laissons à l’Italie

De tous ces faux brillants l’éclatante folie.

Tout doit tendre au bon sens : mais pour y parvenir

Le chemin est glissant et pénible à tenir ;

Pour peu qu’on s’en écarte, aussitôt on se noie.

La raison pour marcher n’a souvent qu’une voie … 

 

Il est certains esprits dont les sombres pensées

Sont d’un nuage épais toujours embarrassées ;

Le jour de la raison ne le saurait percer.

Avant donc que d’écrire apprenez à penser.

Selon que notre idée est plus ou moins obscure,

L’expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.

Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement,

Et les mots pour le dire arrivent aisément.

 

Surtout qu’en vos écrits la langue révérée

Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée.

En vain vous me frappez d’un son mélodieux,

Si le terme est impropre ou le tour vicieux :

Mon esprit n’admet point un pompeux barbarisme,

Ni d’un vers ampoulé l’orgueilleux solécisme.

Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin

Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain.

 

Travaillez à loisir, quelque ordre qui vous presse,

Et ne vous piquez point d’une folle vitesse :

Un style si rapide, et qui court en rimant,

Marque moins trop d’esprit que peu de jugement.

J’aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène,

Dans un pré plein de fleurs lentement se promène,

Qu’un torrent débordé qui, d’un cours orageux,

Roule, plein de gravier, sur un terrain fangeux.

Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage,

Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :

Polissez-le sans cesse et le repolissez ;

Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.

 

(L’Art poétique Chant I, vers 27-48 et 147-174)

 

Partager

Partager Facebook

Proposé par

Deplume

Auteur

Blog

Boileau

03-11-2012

Couverture

"Soyez un lecteur actif et participatif en commentant les textes que vous aimez. À chaque commentaire laissé, votre logo s’affiche et votre profil peut-être visité et lu."
Lire/Ecrire Commentaires Commentaire
L'art d'écrire n'appartient à aucun recueil

 

Domaine Public terminé ! Merci à Deplume.

Tous les Textes publiés sur DPP : http://www.de-plume-en-plume.fr/ sont la propriété exclusive de leurs Auteurs. Aucune copie n’est autorisée sans leur consentement écrit. Toute personne qui reconnaitrait l’un de ses écrits est priée de contacter l’administration du site. Les publications sont archivées et datées avec l’identifiant de chaque membre.