Chouette, je suis invitée à un m... - Texte

Chouette, je suis invitée à un mariage !

Quelle agréable surprise de trouver dans sa boîte aux lettres, que j’appelle boîte à factures, autre chose qu’une déclaration d‘impôt ou une régularisation de charges locatives que je mettrais 5 mois à épurer.

Aujourd’hui, j’ai la joie de trouver une belle enveloppe en papier moche recyclé, avec un carton d’invitation à l’intérieur. Un carton d’invitation aux couleurs recyclées eux aussi. Et moche, donc !

J’ouvre et découvre un Wedding Passport. Je ne connaissais pas. J’avoue que l’idée est originale, même si je trouve, qu’en partant du principe un voyage ne dure pas éternellement (bien oui, il y a un aller et…un retour !), l’associer à mon mariage en sachant que je risque de divorcer avant d’avoir terminé de payer ma robe et le photographe… ça fait cher le voyage. Je trouve ce choix un peu trop fataliste pour une nouvelle vie qui s’annonce déjà avec un billet de retour.

Mais que voulez-vous, c’est original. L’originalité d’un mariage, un critère de haute importance pour la mariée. Même si en regardant ses photos de mariage dans 10 ans, elle regrettera son choix (et son crédit). Les modes passent, les souvenirs restent. Les photos de moi enfant m’ont fait prendre conscience de cette réalité (des palmiers bien centrés au-dessus de la tête, pull en laine à tête de mickey tricoté par mamie et fuseau avec des ananas dessinés dessus).

Seulement pour l’heure, la mariée elle s’en fout ! Elle a feuilleté deux ans de magazine de collection mariage, regardé toutes les photos peoples des derniers mariages de stars. Elle veut trouver THE thème qui lui permettra d’avoir un mariage original, mais classique. Grandiose, mais pas cher. Un peu comme moi qui voudrait des Louboutin neuve avec un budget de 30 € frais de port compris.

Il va falloir faire des compromis. Chose que le marié, qui lui se marierait bien en jeans basket, saucisse cocktail et tireuse à bière a bien compris. Il reste en dehors de ça et fait les compromis pour deux. Pour faire simple, il dit oui joue l’enthousiaste de service et signe les bons de commandes.

Comme si le choix du traiteur, du décorateur, du photographe ainsi que de toute la joyeuse troupe formant les vampires financiers de l’évènementiel, n’était pas assez stressant et chronophage, il a été décidé de passer des heures à dénicher le faire-part qui représentera au mieux le thème de la soirée. Comprenez bien qu’un mariage ayant pour thème : le mariage, ce n’est pas suffisant. Le bonheur du couple et leur envie profondeur de s’unir pour la vie, n’est pas suffisant pour un mariage réussi. Surtout que l’an dernier la coiffeuse s’est mariée (pour la troisième fois) et qu’on en parle encore dans le village. Alors, certes on soupçonne son nouveau mari de fricoter avec l’apprentie vendeuse de la boulangerie du bas de la rue, mais eux au moins ils ont fait les choses en grand. Traiteur renommé (4.8 étoiles sur TripAdvisor), un portraitiste pour que chaque invité reparte avec un dessin de lui-même en souvenir (qui ne rêve pas d’avoir un portrait de lui sur sa table de chevet ?!) une pyramide de champagne, envolée de tourterelles… Bref, le prix d’un pavillon en province pour une seule et unique soirée. Forcément, peu importe qui se mariera juste après, ce qui est sûr c’est qu’il lui faudra faire mieux, plus grand, plus beau, plus cher. 

Si la cousine Magalie s’est mariée sur le thème de la Saint-Valentin en plein mois d’août, la cousine Sandrine se mariera sur le thème Nature et Découverte en pleine campagne, avec en invités surprises : les moustiques, les guêpes, les fourmis et de l’herbe dans l’assiette. Mais on s’en fou c’est tendance !

C’est comme ça que l’on termine dans des mariages qui ressemble plus à des soirées à thème qu’à la célébration d’une union entre deux êtres.

Il serait bon que les mariés arrêtent de ne penser qu’à eux pour se concentrer sur l’essentiel (le mien surtout) à savoir, les invités. Je rappelle que sans nous il n’y a pas de fête (nous remercions chaleureusement les invités du vin d’honneur pour leur contribution au passage) et que sans fête il n’y pas de mariage. Alors merci de nous faire valider le buffet, le lieu de la cérémonie et, le thème de la soirée avant de vous lancer dans des frais que de toute de façon, vous regretterez. Pour vous s’est foutu, vous allez courir partout d’invité en invité, vous serez fatigué avant l’entrée, et vous passerez le reste de la soirée à vous engueuler parce l’un est trop bourré et l’autre pas assez relâché. Alors demandez nous directement ce qui nous ferait plaisir. Merci…

L’un des thèmes tendances depuis quelques années est le « baroque chic ». On se marie en noir et rouge sur fond blanc. Quand on rentre dans la salle de réception (du buffet campagnard…) on se retrouve plongé dans une sorte d’Escape Game. Une soirée sur le thème de « sauve qui peut », pendant laquelle nous sommes enfermés dans une pièce sombre éclairée à la bougie (à led). On se croirait dans l’antre de Dracula. Le but du jeu étant de survivre à la soirée, avec pour seules armes, notre courage et l’alcool pour nous aider à ne pas mourir d’ennui avant la pièce montée.

L’avantage avec l’organisation d’un mariage est que tout est permis. Enfin, à la mariée. Au pire en cas de refus de la part du futur pendu ou des parents (surtout des siens, à lui), il suffit à la future cocue de faire une crise de larmes et hop ! Le tour est joué, le devis est signé.

C’est comme ça, que trois semaines après nous recevons, ce fameux « Wedding Passport » en guise de d’invitation.

Une jolie carte d’embarquement a même été glissée dedans. C’est bien fait non ? On s’y croirait. Tout y est.

Un avion forme un cœur de kérosène en plein milieu de la première page. « L’amour est un voyage qui pollue la vie » pourrait y être inscrit en filigrane que ce serait plus direct.

La photo d’identité des tourtereaux aux visages inexpressifs. Visiblement le bonheur et la joie de vivre n’ont pas leur place sur un faire-part. Le bonheur, c’est intérieur ! ça commence bien.

La date du départ et la destination. Date à laquelle nous espérons secrètement ne pas être disponible au vu de la destination de rêve choisie. Une salle des fêtes dans un village de 450 habitants au fin fond des Vosges. Ma première pensée se tourne vers mon application GPS. Je me demande si aux prix ou sont facturées les mises à jour ils ont pensé à y intégrer les villages fantômes.

Je regarde le Wedding Passport de plus prêt et je lis que celui-ci est délivré par : la République de l’Amour.

À ce moment-là je me dis que c’est trop choux, ça me fait rêver. Puis, et je lis le reste…

« Poursuivant leur grand amour,

La future Cocue et le futur pendu, vont s’envoler vers le bonheur et la vie de couple. (Jusque-là j’ignorais que s’était compatible)

Nous nous invitons à embarquer le samedi 15 juillet à la mairie du charmant petit village paisible nommé : Après il n’y a plus rien mais avant non plus, pour assister à la cérémonie qui sera suivi d’un vin d’honneur.

Afin de finaliser nos rêves de voyages, une urne sera à votre disposition. »

Alors deux choses.

Se marier un 15 juillet. Il faut être un peu con et carrément égoïste. Ça revient à demander au gens de sacrifié leur deux seules vraies semaines de vacances sur une plage de sable fin à se la couler douce et à se nourrir de tapas et de mojito, pour rester dans leur appartement en région parisienne pour assister à un mariage durant lequel on va forcément soir se faire chier, soit rentrer bourré et se faire sauter son permis.

En plus ! cerise sur le gâteau. J’ai bien lu ?! Au vin d’honneur ?! Je suis donc invitée : au vin d’honneur ? Au vin d’HORREUR oui ! Je dois me taper la partie chiante du mariage et aller faire semblant de ne pas être vexée au tour d’une coupe de crémant et trois petits fours de chez picard, de devoir m’éclipser avant le début de la vraie soirée !

À toutes les personnes qui ne connaissent pas le vin d’honneur, en voici la définition :

Vin d’honneur : Arnaque du siècle te faisant croire que tu fais partie des proches, tout en te signifiant subtilement que tu n’es qu’une proche connaissance. On t’aime bien, mais pas trop. Pour ne pas te vexer, tu es invité à te retenir de bailler sur les bancs au fond de la Mairie pendant la cérémonie, puis à venir te désaltérer parmi les proches (les vrais), avant de prendre soin de déposer ton enveloppe pleine de fric dans l’urne soigneusement disposée à la sortie de la salle des fêtes. Sortie, garder par la gargouille de mère, de la mariée, qui en faisant semblant de t’embrasser et de remercier de ta présence s’assurera que tu ne repartes pas en « oubliant » d’y déposer ton tribut.

Tribut, qui te coutera plus cher que le verre de crémant bon marché qui va te retourner les intestins, mais qui en plus, servira à rembourser une partie du repas et de la fête à laquelle tu n’es pas invité.

En résumé c’est un verre qui te coûte une nouvelle tenue, une séance coiffure, un nettoyage de la voiture, un plein d’essence et un chèque de participation à une vie dont tu ne fais partie.

Heureusement, pour moi la carte d’embarquement du Wedding Passport est une carte réponse. Comme ça je pourrais toujours leur faire savoir que je suis au regret de ne pouvoir venir faire mon offrande, car mon célibat et moi décollons la veille pour un voyage en République de l’humour !

...et puis de toute façon, je dois avouer qu’avant cette invitation je ne me rappelais pas de leur existence et encore moins que nous partagions le même arbre généalogique. Alors autant garder l’enveloppe pour un weekend entre copines (qui elles m’inviteront au repas et à la fête ?)

Gwenalice