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Une vie secrète - Texte

Texte "Une vie secrète" est un texte mis en ligne par "Deogratias"..

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Une Vie secrète

 

Mon jardinier m’a dit ce matin : « Vous ne le savez peut-être pas mais la semence des fleurs dort sous la terre jusqu’au printemps ! ».

Depuis, je n’arrête pas d’y penser.

 

Enterrée dans la terre, je sais que je vais bientôt sortir. C’est une question de saison. Dès que le soleil reviendra réchauffer le sol, je surgirai.

Enfermée dans le noir de ces entrailles humides, j’attends l’occasion. Sans trop de bruit. Toute cachée, j’espère un jour m’étaler, là, devant tous.

Pour l’instant, j’entends les pas résonner au-dessus de moi, les gens marchent à perdre haleine, que dis-je ? Ils courent toujours pressés. Les rires des enfants qui courent après leur ballon me parviennent aussi.  

Ces cris, juste là, beaucoup plus haut que moi, c’est amusant, on dirait la vibration d’un réveille-matin qui me sort de ma torpeur.

Comme c’est étrange la vie à cet endroit, je suis invisible, j’écoute ce qui se passe, juste là, un peu plus haut que ma tête. Pourquoi vont-ils si vite ?

Moi, je prends tout mon temps. Ma force est dans le silence. Le bruit du monde est un vacarme si pesant, j’aime mieux, avant que mon tour n’arrive, rester là, blottie dans le ventre de la terre.

Au loin,  j’entends aussi le cri silencieux de la rivière qui  coule. Immuable.

 

« Les fleurs dorment sous la terre avant le printemps ! ». Quelle annonce !

 

Le coucou s’amuse à se cacher, il espère toujours, par son cri, qu’on le trouve. Le pic-vert tape sur sa batterie naturelle, il rythme la cadence de mon cœur qui palpite. Il bat à l’unisson de mes émotions secrètes.

Et puis, quel étrange ravissement que ces fougères illuminées par le soleil, sans compter la pluie qui perle de rosée sur le bord des rochers. Pourquoi envierais-je les concerts dans des salles enfermées, alors que là, si près, tout un univers étale sa gloire sans trêve et sans pâleur ?

Voyez-vous j’ai la beauté des secrets bien gardés. On ne sait pas que je suis là, bien à l’abri, comme endormi, mon éclat ne tardera pas. C’est une question de temps.

À ma vue, vous ferez une pause, enfin, vous regarderez tout ce qui vous entoure, vous découvrirez le miracle de la Vie imperturbable dans son jaillissement.

Le disque d’or accroché dans le ciel darde ses rayons dans les allées de la forêt immense, on dirait la nef d’une église quand approche le soir. La lumière crépusculaire qui apaise les âmes, je la sens, parfois, venir jusqu’à moi.

« Les fleurs dorment sous la terre ». Elles hibernent. Elles se préparent.

 

En ville, tout un charivari emporte la multitude dans le tumulte d’une vie sans souffle, mais, moi je suis là, je ne bouge pas. Nul ne le sait.

Réfugiée dans le silence obscur, mon jour viendra, aussi sûr que le vent traverse vos poumons. Les oiseaux voyageurs qui prennent leur envol m’invitent à les rejoindre dans l’espace ouvert qui me verra bientôt.

Ni le temps, ni l’espace, ni les couleurs, ni le cosmos, ni l’univers, ni la terre, ni le ciel, personne ne pourra m’en empêcher.

Je vais surgir, bientôt, et le pire, voyez-vous, c’est que mes larmes de bonheur, il y a des chances que personne ne les remarque.

Je suis le plus souvent pour les hommes une habitude sans saveur, un ordinaire sans intérêt, que dis-je ? Une petite histoire de rien du tout.

Ah pourtant, si vous pouviez voir l’effort que je fais pour sortir ! Je pousse, je tire, je m’élance, je prends appui, allez, encore un peu, rien qu’un peu, oui, c’est ça, tu y es ! C’est un périple, une aventure, une audace qui me chavire.

Qui m’attend ?

Mais tout le monde ! La forêt immense, le jardin peuplé des insectes minuscules, les oiseaux frimeurs qui s’égosillent, le bruit silencieux des arbres vaniteux aux feuillages époustouflants, les courbes ravissantes des rochers éclaboussés par la rivière. Tout le monde me découvrira.

 

« Les fleurs dorment sous la terre jusqu’à l’arrivée du printemps ». Pourquoi le jardinier me l’a dit ?

 

Cette vérité poétique a touché mon cœur, elle a fléché mon centre sans s’annoncer. Comme les fleurs au printemps sortent de terre pour éblouir.

J’ai la force des semences printanières.

M’élancer dehors sans craindre les mauvais sorts et les vents contraires, je vous assure, quelle ténacité ! Quelle constance !

Vous ne le voyez pas, pourtant, oui, pourtant, les fleurs sont mes amies, depuis longtemps déjà, elles m’indiquent le chemin, la clarté de la Vie, et la beauté du ciel.

Elles ont l’intériorité d’une vie secrète bien avant d’éclore,

Elles ont la profondeur de la terre bien avant d’être dehors,

Une vie secrète qui précède, enfante et s’ouvre à la Vie.

 

Elles sont ce que je suis

 

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Deogratias

11-02-2023

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Une vie secrète appartient au recueil Textes et poésies

 

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