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Tremblements - Journal intime

Journal intime "Tremblements" est un journal intime mis en ligne par "Deogratias"..

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Ceux qui n'aiment pas lire "des tranches" de vie ne sont pas obligés de me lire...

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Tremblements

 

 

Il y a les frissons, les sueurs froides, les vertiges, les étourdissements, les maux de tête ou de gorge. Moi, c’est les tremblements. Si j’étais un objet, je serais un vibro masseur, si j’étais un animal je serais mon petit chien au sortir de la douche.

 

Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours tremblé.  Pour un rien, pour tout. Une émotion négative qui me vient de la part d’autrui par exemple, aussitôt, voilà mes mains en mode vibreur. Avant mes neuf ans, je ne ressentais que des frissons intérieurs, une sorte de malaise physique. L’impression d’être parcourue par le froid de l’hiver. 

 

Après mes 10 ans, c’est l’épilepsie qui provoquait mes tremblements. Tout commençait toujours par cela : Tout d’un coup, traversée par une décharge électrique inexpliquée, je me retrouvais secouée par ses assauts vigoureux.

Tout le monde me regardait. En quelques minutes à peine : Secousses, tremblements, cris, perte de connaissance : la totale. Je ressortais de là épuisée. Surtout, je devenais comme une étrangère pour moi-même : Quel était ce mal  qui  me saisissait sans que je puisse le contrôler ?  J’avais l’impression permanente d’être en danger. Comme si j’abritais en moi une autre Sylvie :  L’incontrôlable, la vibreuse, la furie même.

Petit à petit, j’en arrivais à avoir peur de moi-même.

 

Ensuite, jusqu’à mes 40 ans passés, mon hypersensibilité, au contact des autres et du monde, provoquait là encore toute une série de réactions physiques : De la nausée au mal de tête en passant par des crises de larmes.  Mais le plus visible, le plus manifeste, le plus impressionnant : Ce furent toujours mes tremblements. Combien de fois me disait-on : « Pourquoi tu trembles ? C’est pas la peine de trembler !", "Dis donc, qu’est-ce que tu trembles ! Faut pas trembler comme ça, on va rien te faire ! ». 

Comment expliquer alors que je n’avais aucun contrôle sur ces réactions ?  C’était plus fort que moi.

 

Une remarque d’une collègue sur ma tenue : Tremblements. Une critique sur mon travail : Tremblements. Une parole très poétique, belle comme tout : Tremblements. Un débat passionné : Tremblements. Un film aux émotions intenses : Tremblements. Un voisin qui s’engueule avec sa femme : Tremblements. Un enfant qui me fait un compliment : Tremblements. Une lecture que j’aime : Tremblements.

Ce n’est plus seulement à cause d’émotions négatives que je me mets à trembler, mais en réponse à toute émotion : Belle, intense, imprévisible, forte, bienveillante  voire spirituelle.

 

Je suis une trembleuse. Une tremblotante. Une tremblante. Une trembloteuse. Une tremblette. Une trembletum, du latin : Tremblum.

 

Ensuite, au vu de ma fragilité, ce qui devait arriver arriva : J’ai développé une maladie dégénérative qu’on appelle : « Des tremblements essentiels ».

C’est amusant parce que la médecine qualifie « d’essentiel » tout ce qu’elle n’explique pas. Mes tremblements sont inexpliqués. La médecine reste incapable non seulement de prévenir mais aussi de guérir cette pathologie.

Ce mal commence par les mains, puis par le cou, et enfin la voix devient à son tour chevrotante. Aucun traitement si ce n’est un bêta bloquant pour freiner son évolution.

 

Alors voilà je continue de trembler. De progression lente chez moi, elle n’en demeure pas moins difficile à gérer au quotidien.

Cependant, je suis contente : En couture, les nouvelles machines sont de véritables petits bijoux de technologie, je peux coudre sans souci grâce à l’enfileur d’aiguille automatique.

Je peux tricoter grâce à des tricotins performants.

En ce moment, je confectionne des petits anges avec des rouleaux de papier toilette, un peu de colle chaude, de la laine et des perles. On trouve maintenant des petites têtes peintes à l’avance qui m’évitent le souci de peindre moi-même les yeux et la bouche. Je n'écris presque plus avec un stylo mais le clavier est plus rapide : Je peux m'adonner à ma passion pour l'écriture.

 

Dans ma vie professionnelle, devant les nombreux jeux de pouvoir, les difficultés relationnelles, les exigences sans fondement, quand mes mains commençaient à trembler, je les cachais vite fait dans mes poches ou derrière mon dos. Vous voyez, je m’arrange. 

 

Je suis ainsi faite : Hyper-émotive, hyper-consciencieuse, hyper-fragile, hyper-sensibble, hyper tout tout tout. Parfois il me faut plus de deux heures pour retrouver des mains en mode  « off ». Plus je vieillis, plus le phénomène devient prégnant. Forcément, c’est dégénératif.

 

Je suis hypertendue, hyper à part, hyper spéciale, hyper poétique, hyper tout tout tout.

 

Je dis parfois à ceux qui n’osent m’en parler : « T’inquiète. Quand j’arriverai au ciel, St Pierre me reconnaîtra tout de suite. Je serai la seule qui fera tomber son stylo pour signer son registre d’entrée.

J’irai au paradis avec tous les petits vibreurs du monde, comme les étoiles la nuit, comme les yeux des enfants, comme les feuilles à l’automne, comme les manèges, comme la flamme des bougies, comme les marteaux-piqueurs, comme la terre aussi. Parfois.

Je suis une tremble-terre sismique. Si on se moque, je m’en amuse. Si on me plaint, je ris aussi.

 

Cependant, je me protège de plus en plus d’émotions fortes. Un jour que j’ignore encore, le Bon Dieu me prendra par la main pour m’emmener dans le calme souverain…

 

Sans stupeur et sans tremblement.

 

Ecrit dans le cadre d'un atelier d'écriture : Ecrire une spécificité de sa vie...sous un certain angle de vue...

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Auteur

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Deogratias

19-10-2024

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