Mes mots - Journal intime

Mes mots

Ça se bouscule, tout se bouscule.

Souvent, l’écrivain a l’angoisse de la page blanche. Je ne l’ai pas et pourtant il m’arrive de ne rien produire. Car lorsque j’installe ma plume sur la feuille, avec une idée, lorsque je pose les premiers mots sur leur première ligne, alors tout culbute.

Une idée en cache une autre, un mot en appelle un autre, ce dernier est déjà un concept et alors que ma main tente de discipliner ma plume, ma tête court déjà sur la feuille suivante.

Je veux écrire l’amour mais l’étoile est là qui m’appelle à peindre un paysage de brousse. Je veux chanter la magie de l’Afrique mais la souffrance de la planète m’apostrophe. Je pose les mots de l’aventure et la phrase se forme pour traiter des voyages faits, rêvés, prévus, à venir…

Mais comment arriver à me canaliser ? Comment rester dans le thème commandé ? Je suis gourmande de mots et l’un entrainant l’autre, je ne peux plus m’arrêter. Le merle saute de branche en branche pour aller picorer les cerises qu’il convoite. J’aime ce chemin qui me permet de bondir d’un mot dur pour m’étendre sur une phrase duveteuse, qui m’autorise la rondeur d’une lettre noyée dans le bleu colorié par l’expression de fin.

L’amour, le monde, l’humain.

La guerre, la nature, l’amour du monde.

Désir de chair, histoire de civilisation, innocence de l’enfance.

Mettre en place sa routine, choisir une plume et attaquer les kilomètres au bout desquels la trame sera posée, les couleurs choisies, les personnages esquissés. C’est alors que les mots prennent vie pour créer un monde. Chaque œuvre doit apporter une idée nouvelle. Chaque texte doit dire une chose nouvelle. Les mots suivant qu’ils sont assemblés, dissociés, coloriés, déshumanisés ou chantés donnent tout son sens au texte. Ils sont la substance de leur auteur.

Lettres, mots, phrases, soyez ma substance. Aidez-moi à dire le monde.

Accompagnez-moi pour gazouiller la joie.

Escortez ma pensée quand elle cherche à dire son amour, son amour de l’humain, l’amour des siens, mon amour pour lui.

Eloignez-moi de la douleur, échappez-moi de la grande faucheuse.

Je regrouperai les couleurs dans la boite de mon violon, je rassemblerai les odeurs dans mon filet à papillon. Je compilerai les tonalités et les résonnances dans du papier de soie, j’engrangerai les impressions dans mon grand filet de pêche. Lorsque je saupoudrerai le tout sur les lignes de mon prochain cahier, je voudrais que le monde que je vous raconterai soit le reflet de la violette et du condor. La fragilité d’une fleurette et la liberté de l’oiseau. La vulnérabilité de la mignonne et la détermination de l’oiseau de proie.

Je t’aime ma vie. Je te veux pleine et ronde.

Je t’aime ma plume, je te veux pour décrire la vie.

Ca. Valmalette

2014-08-09 Cabrousse