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Méfiez-vous des blondes - Roman

Roman "Méfiez-vous des blondes" est un roman mis en ligne par "J.L.Miranda".. Rejoignez la communauté de "De Plume En Plume" et suivez les mésaventures de Audrey et cie...

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Méfiez-vous des blondes

  Petit roman (drame)

* * *

Ce roman a pour sujet la difficulté de la vie à deux. Audrey est trop belle pour Claude. Dès le début de l'histoire, la jalousie maladive de ce dernier et la nature insoumise de sa femme laissent pressentir les déchirements à venir.
La fréquentation assidue de Nicolas, son premier amour, montre à Audrey le piètre état de son ménage et l'amène à constater qu'elle n'a jamais vraiment aimé son mari. Elle pense naturellement au divorce, avec l'intention de refaire sa vie avec Nicolas, qui va se révéler un séducteur fourbe et cynique.
Un jour, se croyant trompé, Claude frappe violemment sa femme. Elle se réfugie chez sa mère, puis s'enfuit à Paris. Là, elle rencontre Julio, un garçon au tempérament romanesque, qui tombe follement amoureux d'elle. Audrey ne croit plus à l'amour, mais elle tente de se servir de Julio pour retrouver sa liberté et avoir la garde de son fils.

1

Suicide manqué

Lorsqu’elle se réveilla, Audrey se trouvait dans un lit d’hôpital, avec de la fièvre et des courbatures. Elle toussotait sans cesse, respirant avec difficulté. D’abord, elle sentit ce relent particulier des édifices habités par la maladie, où la mort rôde dans les escaliers obscurs, derrière une porte grinçant sur ses gonds ; où l’air charrie plus de gémissements de souffrance que des cris de joie, et d’où l’on peut sortir guéri, ou bien, les pieds devant.

Ouvrant les yeux, elle fut tout d’abord frappée par l’aspect blafard de la chambre. Le flacon de sérum, relié par un tuyau transparent au revers de sa main droite, attira le premier son attention. Puis elle remarqua le poste de télévision qui trônait au fond de la pièce ; elle découvrit la petite desserte à roulettes, un siège vide près de la fenêtre. Enfin, elle se rendit compte qu’il y avait un deuxième lit à côté du sien, un lit de fer peint d’une couleur pastel. Une jeune femme noire y était allongée, elle regarda Audrey d’un œil paisible, vaguement intéressée par sa compagne de chambre.

A travers la fenêtre, Audrey voyait le jour assombri qu’il faisait dehors. Dans la chaleur du lit, juste après le réveil, elle ressentait encore sur la peau une impression de froid humide, comme si elle avait passé la nuit dans un moule de glace. Si bien qu’elle tâta instinctivement sa poitrine, s’assurant que ses vêtements n'étaient pas trempés. Alors, elle remarqua qu’on l’avait affublée d’un pyjama rose de taille trop grande, avec un arbre vert brodé sur le cœur. Des gouttes de pluie glissaient en biaisant sur les vitres, comme des larmes sur des joues creusées de rides. Elle fit un effort pour reconstituer de mémoire son passé récent :

« Pour s’abreuver à ma source, lui avait-elle dit, il faut d’abord prendre mon cœur.»

« Merci de m’avoir tiré d’affaire. Vous êtes une belle menteuse, qu’il lui avait répondu, juste avant qu’elle ne descende dans la station de métro. »

Elle n’avait pas eu le temps de s'acheter un ticket de métro, s’était glissée sous le tourniquet comme un loubard fauché, à la dérobade, avant de se diriger vers les quais. Sa dégaine attirait l’attention des voyageurs qui la croisaient. Elle tremblait de froid et de fatigue, titubant sur ses jambes, les cheveux collés sur les joues, la peau violacée comme devait l’être son cœur défaillant.

Les gens s’écartèrent pour lui faire une place sur un banc. Elle s’y affaissa, à côté d’une jeune femme au teint clair, soigneusement coiffée, qui sentait le parfum haut de gamme. Celle-ci eut un mouvement de répulsion, elle se releva aussitôt en grimaçant, contrariée, sans dire un mot, et elle se mit à marcher le long du quai.

Au bout d’un instant, Audrey perçut au loin un hurlement mêlé d’un bruit de ferraille, qui s’amplifia très vite dans sa cervelle et atteignit une telle intensité qu’elle dut plaquer les mains sur ses oreilles, persuadée que sa tête allait éclater comme un ballon trop gonflé. Elle ne voyait plus, ne sentait plus, ne pensait plus. Elle voulait en finir, voulait se terrer dans un trou empli de silence. Une rame s’approchait de la station. Elle se remit debout, fit irruption au bord du quai, pour se jeter à plein ventre sur la voie…

Un médecin vint interrompre l’évocation de son passé récent. Il portait une tenue décontractée, la blouse à demi ouverte, le col de la chemise déboutonné. Au premier regard, elle se fit une opinion sur lui. C’était un homme d’une quarantaine d’années, les tempes grisonnantes, avec de l’embonpoint visible dans la proéminence du ventre et l’arrondi des épaules. Elle le voyait rassurant, sympathique, malgré son visage aux traits un peu rudes.

Après avoir regardé le graphique qui pendait, accroché au pied du lit, il s’adressa à la patiente :

– Bonjour, madame. Comment ça va ? dit-il d’un air bienveillant.

– Je me sens fatigué, docteur. J’ai du mal à respirer.

Et puis, dès que je bouge, je ressens une douleur aiguë du côté droit de la poitrine. Qu’est-ce qu’il m’est arrivé ? Pourriez-vous me le dire ?

Il se trouvait entre les deux lits, le dos tourné vers la jeune femme noire. Pour répondre à Audrey, il se pencha en avant, baissant la voix, comme pour lui confier un secret qui devait rester entre eux.

– Vous avez eu la mauvaise idée de vous jeter sur les rails du métro. Vous ne vous en souvenez pas ?

– Vaguement, comme d’un mauvais rêve.

– Vous avez eu beaucoup de chance. Le train qui entrait dans la station, à ce moment-là, circulait du côté opposé à celui où vous êtes tombée. Et vous avez évité de justesse le rail d’alimentation en énergie, celui qui est au milieu de la voie, vous voyez ?... Trempée comme vous l’étiez, il vous aurait grillée instantanément.

– Est-ce que je dois rester longtemps hospitalisée ?

– Dans quelques jours, vous serez sur pied. Vous vous en êtes tirée avec deux côtes cassées, une mauvaise bronchite et plusieurs contusions, ce qui n’est pas rien. Cela dit, vous êtes solide. Ne faites pas de mouvements brusques, ne vous retournez pas sur le côté droit. Soyez sage, tout se passera bien.

Au cours de cette période de repos forcé, Audrey put faire le point. Des réflexions se mêlaient constamment à ses souvenirs. Le retour à un état normal commençait à se dessiner. Elle ne s’arrêta pas aux petits détails de son séjour à l’hôpital, qui lui causaient une impression fort désagréable. Ce n’était pas là son propos. Elle n’y pensait pas, son esprit se trouvait constamment occupé par des pensées étrangères à sa présence dans un établissement de santé. Il lui fallait surtout revenir dans le passé par la mémoire, essayant autant que possible d’entrevoir les voies incertaines de l’avenir.

Jamais elle n’aurait trompé son mari, s’il ne l’avait pas battue. Sa fidélité avait été mise à l’épreuve des années durant, et elle avait tenu bon. Le contremaître de l’usine où elle avait été employée, coureur notoire, lui faisait miroiter des avantages pécuniaires, ainsi qu’un poste de responsabilité dans le service des expéditions. Elle osa repousser ses avances, au risque de se retrouver au chômage, ce qui ne manqua pas de se produire à la première occasion.

Comme l’entreprise était en sureffectif, à cause de la baisse des commandes, on décida de licencier une partie du personnel pour raison économique. Elle ne fut nullement surprise quand elle apprit que son nom figurait en tête de liste. Néanmoins, elle ne put s’empêcher de questionner le contremaître:

 – Bonjour, M. François. Est-ce que je peux vous voir un instant ? dit Audrey, les bras croisés sur sa poitrine.

– Bien sûr, Audrey. Quel bon vent vous amène ?

– Je viens d’apprendre qu’on m’a donné la première place sur la charrette. Vous n’y êtes pour rien, bien sûr ?

– Non, je n’y suis pour rien, comme vous dites. La liste a été établie par le chef du personnel.

– Oh, bien sûr ! Suivant vos indications, ça va de soi ? Si j’avais tendu l’oreille à vos avances, je n’en serais pas là, hein ? J’ai comme une envie de faire une dernière partie de tennis avec vous.

– Vous êtes une championne maintenant. Je n’ai aucune chance, le match est trop déséquilibré.

– Allons, M. François ! Pour le plaisir, voyons. Je ne forcerais pas mon talent.

– Dois-je comprendre que vous acceptez aujourd’hui ce que vous avez toujours refusé ? Vous me demandez en échange, évidemment, que je me débrouille pour enlever votre nom de la liste. Est-ce que je me trompe ?

– Ça ne me déplairait pas, ma foi. Payer une faveur par une faveur, c’est équitable, vous en conviendrez.

– Désolé, madame. Les occasions, il faut les saisir quand elles se présentent. C’est trop tard maintenant.

– On peut quand même jouer le match, cela prouve que je ne vous en veux pas.

– Vous avez un coup fourré derrière votre petite tête. Je vous connais trop bien pour me laisser prendre à vos pièges.

– Allons, M. François ! Vous avez peur d’une faible femme ? Vous me licenciez, faites-moi le plaisir de jouer avec moi une dernière fois. C’est vous qui m’avez appris les bases du tennis. L’auriez-vous oublié ?

– D’accord, va pour le match. Pour ce qui est de votre réintégration, je verrais ce que je peux faire. »

Un dimanche matin, à l’heure convenue, ils se retrouvèrent sur un court peu fréquenté. En arrivant, le contremaître apprit à Audrey que son nom serait effacé de la liste. Le chef du personnel la convoquerait le lendemain pour lui annoncer la bonne nouvelle.

– Il ne restera alors qu’à fixer notre rendez-vous galant. Je propose un petit hôtel en ville. Un coin agréable et discret.

– Nous en reparlerons, jouons d’abord.

Ils n’avaient pas terminé le premier jeu quand deux hommes masqués firent leur apparition, l’un d’eux tenant la main une baguette verte et souple qu’il faisait siffler, cinglant l’air. Audrey allait servir à ce moment-là, elle suspendit la frappe, pour suivre des yeux les nouveaux venus, qui semblaient animés d’intentions hostiles. Ils se dirigèrent droit sur le contremaître qui prit ses jambes à son cou, mais il n’alla pas bien loin ; les deux hommes s’y attendaient et ils étaient bien plus rapides que lui. Devinant ce qui allait se passer, Audrey rangea ses affaires, accrocha son sac à l’épaule et se dépêcha de quitter les lieux.

« T’es un gros cochon. Tu profites de ta position pour satisfaire tes vices. Tu vas prendre deux coups de baguette pour chaque femme que tu as eue en profitant de ta position dominante, dit l’un des justiciers. »

Il tenait le contremaître couché sur le ventre, avec l’interdiction formelle de bouger. Il sortit une liste de sa poche, se tourna vers son complice et le mit en garde sur la manière de frapper. Il s’agissait d’une punition, non d’un massacre. Lorsqu’il aurait eu son compte, il devrait pouvoir rentrer chez lui par ses propres moyens :

« Tu frappes les cuisses, les mollets et les fesses. Pas avec la force que tu mets à couper du bois de chauffe. Il doit juste avoir sur la peau l’empreinte de la baguette. Pas de coupures ni de sang. Allons-y ! dit-il fixant les yeux sur sa liste. »

« Francine, Rose, Anne-Marie, Nancy, Carole, Rita, Michèle, Maryse, Sylvie…»

La liste comportait trente-trois prénoms féminins. Autant dire que la baguette cingla la chair du contremaître soixante-six fois. Celui-ci tapait le sol devant lui, de ses poings fermés rageusement. Tour à tour, il jurait, hurlait, suppliait, gigotait…

Lorsque le supplice fut terminé, les deux hommes s’éloignèrent comme ils étaient venus, côte à côte et en silence. Resté seul, le contremaître se releva timidement et, tournant le regard effrayé autour de lui, il regagna sa voiture en courant.

 

 

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J.L.Miranda

01-01-2018

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Méfiez-vous des blondes n'appartient à aucun recueil

 

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