"Les ricochets" est un texte mis en ligne par
"Deogratias"..
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Les ricochets "Les grandes intensités vivent en nous, malgré nous, en silence "(Christian Bobin)
Après le coup de fil d’une amie, je me sentais mal sans bien comprendre pourquoi. J’étais envahie d’une tristesse si puissante que j’en avais la nausée. Puis, me sont revenues les paroles de Mme D. avec qui j’avais rendez-vous quelques heures plus tôt : « Le monde aime la neutralité émotionnelle. Envahir les autres par une émotion positive ou négative, ils vont le vivre comme une intrusion ». Voilà, c’était peut-être pour ça : Je ressentais de nouveau ce décalage lié à mon intensité. Je suis intense et je n’arrive pas à être autrement. Cela rend mon niveau d’exigence trop grand pour la plupart. Pourtant, je ne m’en rends pas compte. J’en prends conscience seulement maintenant. Oui, Mme D. avait raison, les gens n’aiment pas, ils ne veulent surtout pas être dans l’intensité. Cela ne leur convient pas. Je les comprends, ils doivent le vivre comme quelque chose qui les épuise.
En ce qui me concerne, je n’ai pas choisi d’être ainsi. L’intensité m’habite bien malgré moi. Ce n’est ni un choix, ni un caprice, ni un genre que je me donnerai. Non. Je suis ainsi faite. Mme D. l’a bien compris. L’intensité m’habite non seulement dans mon cœur, au plus profond de l’âme. Mais aussi dans mon corps. Je la ressens jusque dans les ramifications les plus invisibles de mon organisme. Elle est mon sang, elle est dans mes veines, mes os et ma chair. Tellement que je souffre de tremblements essentiels qui me font vibrer comme un petit moteur. Souvent pour rire, je dis : « Quand j’arriverai au ciel, le Bon Dieu me reconnaitra tout de suite parce que je suis toujours en mode vibreur ! ».
L’intensité est une manière d’être avec le monde, ce n’est pas une originalité d’artiste ni une lubie, pas plus qu’un faire-valoir. C’est une douleur et un bonheur conjugués. C’est comme porter en soi un grand trésor ou bien une volière invisible dont les oiseaux vont et viennent dans un tourbillon qui n’a pas de fin. C’est aussi une souffrance parce que les oiseaux de temps en temps aimeraient se poser sur un fil pour n’en plus bouger. Est-ce que les oiseaux se reposent ? Il parait qu’ils se cachent pour mourir, mais est-ce qu’ils dorment au moins ? Oui, mais même dans leur sommeil, ils gardent une patte levée, endormis dans un équilibre fragile.
L’intensité ouvre les portes mais aussi les referme. Elle vous livre au monde comme une proie. Rien de plus facile que d’être broyé. Elle vous donne cependant bien des lumières, bien des couleurs, toute une gamme d’émotions, de détails, de contemplations que vous êtes seule à vivre. Elle a cela de particulier c’est qu’elle ramène toujours tout à la solitude existentielle d’une personne. Ce qu’Albert Camus disait si bien : « Il y a dans chaque coeur un coin de solitude que personne ne peut atteindre ». Pour mon âme, l’intensité est décuplée à l’infini à chaque rencontre, chaque évènement, chaque joie ou chaque peine. C’est étrange finalement. Elle est une épée qui sépare. Un chêne qui s'élève vers les sommets. Une guitare aux cordes dissonantes. Un oiseau qui ne sait pas se reposer. Une fleur qui ne se referme jamais, même la nuit. Elle est une musique ininterrompue Un soleil qui réchauffe ou bien qui me brûle. La terre aride du désert en même temps qu’un ciboire vers la divinité. L’intensité est une merveille. Elle est aussi une guerre. Une armée en déroute avec son drapeau blanc hissé vers le haut Mais dont les ennemis ne cèdent pas. C'est une psalmodie sans début ni fin. C’est un lac sans rides dont la surface se met à danser au plus petit galet. Elle tourne vertigineuse par la multitude de ses ricochets.
Oui, c’est si vrai que pour écrire ce que je viens de dire, il me suffit de fermer les yeux, j’écoute en mon dedans : Tout monte comme la mer quand vient l’heure de la marée. C’est limpide, tellement puissant. Si je ne le ressentais pas, je ne pourrai pas l’écrire comme ça. C’est quelque chose d’unique comme nous le sommes chacun de nous.
S’il vous plait, par mon écriture, venez cueillir la fleur Intensité sans vous moquer, sans la jeter, sans la briser. Puis, à votre tour, fermez les yeux : écoutez-vous, là, au plus profond, l’intensité qui vous habite ne demande qu’à vous emporter dans sa danse…
….Qui tourne vertigineuse par la multitude de ses ricochets… |
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Les ricochets
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