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Les cabossés - Poème

Poème "Les cabossés" est un poème mis en ligne par "Deogratias".non classique, moderne, vers libres,

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Les cabossés

 

Sandrine portait une longue jupe noire jusqu’aux pieds

Assise sur un banc de square avec l’air perdu

Je la reconnaissais : avec sa clope entre les lèvres

Et ses mains qui tremblaient à la recherche

De son mouchoir pour essuyer sa chaussure sale.

 

Michel portait un vieux chapeau tout délavé,

Assis au bar tabac juste devant le boulevard

Ses rides profondes lui barraient le visage

Comme autant d’entailles que la vie lui avait assénées.

Je les observais parfois,

J’aurai même pu les dessiner les yeux fermés.

 

Mireille avançait un peu titubante après son insomnie

De cette nuit puis de la précédente et des autres encore avant

Il y avait bien longtemps qu’elle ne dormait plus.

Les valises sous ses yeux fatigués en disaient long sur ses soucis

Je la regardais marcher le matin, je suis sûre qu’elle errait en quête du sommeil

Dans l’espoir de dormir enfin.

 

Jean écrivait sur un calepin, toujours le même

Lorsque je le croisais en salle d’attente

La faim  partie, tous ses kilos en moins

Ce n’était pas rien pour lui de trouver l’appétit

Maigre comme un coucou, il croisait ses bras.

Emmitouflé dans une veste bien trop grande

 Comme pour cacher sa maigreur.

Je l’avais bien compris.

Il avait toujours froid.

 

Sophie toussait à chaque fois que je la rencontrais

La dame avec ses béquilles, appuyée dessus

Comme si c’était des bras qui la soutenaient.

La bouche un peu de travers, je l’avais remarqué,

Elle parlait souvent seule sur les trottoirs.

Comme si d’invisibles amies

Pouvaient lui donner les réponses espérées.

 

Victor s’asseyait le plus souvent à côté de l’étang

Dans le parc près de chez moi, solitaire,

A se gratter les jambes, les bras, les joues.

Son costume élimé bien trop sale

Il le portait tous les jours.

J’aurai voulu lui rendre

Le sourire que les deuils lui avaient retiré.

 

****

Mon Dieu, que j’aime les cabossés de la vie

Ceux qu’ont raté, ceux qui savent plus,

Ceux qui regrettent et plein d’humilité

Qui disent en parlant d’eux qu’ils sont des pauvres bougres

 

 Mon Dieu, qu’ils sont touchants les cabossés

Eux qui se sont perdus quelque part

Entre les autres et eux,

Entre la vie et la fadeur des jours

Entre le monde et Dieu.

 

Mon Dieu, je rends hommage à tous les cabossés qui savent 

Qu’on ne fait rien de bien quand on se croit quelqu’un.

Qui chantent faux sous la pluie puis qui rient trop fort

A gêner tous les autres qui les regardent en biais

 

Mon Dieu, j’exalte leur simplicité, leur dernière place

Eux qui confessent leurs fautes

« Moitié avouées, moitié pardonnées »

Qui ne clament pas leurs réussites et leurs diplômes

Comme si c’était les clefs de la Vie "sur la terre comme au ciel".

 

Mon Dieu, Donnez-moi le cœur des cabossés

Qui prient dans le silence de leurs blessures

Sans trop se regarder souffrir.

Eux qui pleurent tout bas le gâchis de leur vie

Alors que j’y vois tant de mérites et de fragilité.

 

Mon Dieu, vive les cabossés qui savent bien

Qu’on peut rire parfois, même sans un abri.

 

Ô Dieu des cabossés, je t’en prie, n’oublie pas

Tous les malmenés blottis dans le secret de toi.

Ni ta petite cabossée cachée dans le creux de tes bras.

*****

 Ci-dessous : Jeune fille de 11 ans à l'époque gagnante 

de l'émission : "La Hollande a du talent".

Elle me touche beaucoup.

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Deogratias

23-11-2023

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Les cabossés appartient au recueil Textes et poésies

 

Poème terminé ! Merci à Deogratias.

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