Le soir tombe - Pause-Mélancolie

Le soir tombe

Mon amie oublie les jours de la semaine

Lundi mardi ou jeudi. Elle ne sait plus bien.

"Pas grave", que je lui dis. C’est vrai pas grave.

Mais elle oublie.

Mon amie oublie ce qu’elle a fait deux heures avant

Ménage ou courses ou visite d’une amie. Elle ne sait plus bien.

"Pas important" que je lui dis. C’est vrai pas important.

Mais elle oublie.

Mon amie oublie qu’elle m’a déjà raconté l’histoire

qu’elle a pris le temps de  me répéter ce soir.

« Je te l’avais déjà dit non ? Ou bien je voulais te le dire ? ».

Elle ne sait plus bien.

"Qu’importe ! " que je lui dis. "C’est toujours intéressant".

Mais elle oublie.

Mon amie oublie de m’appeler à l’heure qu’on avait fixé.

« J’ai laissé passer le temps, je dois tout écrire ».

Elle ne se rappelle plus trop.

« Ce qui compte c’est qu’on se parle maintenant ! » que je lui dis.

C’est ça qui compte.

Mais elle oublie.

Mon amie est sûre d’avoir ranger son carnet sur sa table mais ne le retrouve pas.

« Je suis sûre de moi, sûre et certaine. Je me souviens très bien ».

Elle est si ordonnée.

« Ce n’est pas sûre, tu sais quelquefois, on le croit et puis non !

Ça m’arrive aussi ».

Elle sourit.

Mais elle oublie.

Mon amie n’arrive plus à regarder des émissions télés entrecoupées de publicité.

« Même si c’est intéressant, je n'arrive plus à me concentrer !

Après, je passe à autre chose ».

« C’est fréquent tu sais", que je lui dis, "moi-même des fois

j’oublie de voir la suite ».

Elle est rassurée c’est sûr.

Mais elle oublie.

Mon amie allait prier avec quelques paroissiens chaque jeudi soir.

Histoire de sortir un peu.

« Mais je ne reconnais plus les gens qui prient avec moi. Quand je les croise dans la rue, je ne sais plus qui est qui. C’est embêtant ».

« Si tu savais le nombre de fois où cela m’arrive !

je ne suis pas très physionomiste », que je lui dis.

Elle en est convaincue aussi.

Mais elle oublie.

Le soir tombe. Il tombe toujours. Comme mon cœur ce soir.

Il est bête celui-là à toujours tomber. Il pourrait nous saluer de la main.

Ce serait bien suffisant. Mais non, il tombe.

Mon amie ferme ses volets, ses fenêtres et ses portes quand le soir descend.

Il est sot celui-là à toujours descendre. Il pourrait rester là où il est.

Pourquoi vient-il ? On ne l’a pas même invité !

J’avais oublié que le jour décline. 

En vérité, à l'heure qu'il est, je tombe avec le soir et je pleure.

La douleur est telle….Elle me tord...

Je voudrais oublier que mon amie oublie…