"L'immeuble" est un texte court mis en ligne par
"Deogratias"..
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Remarque : ce texte a été écrit pour répondre à un exercice d'écriture portant sur la description métaphorique. Il ne reflète pas nécessairement mon état d'esprit personnel. En tout cas, pas complètement... L’immeuble
L’immeuble devant ma fenêtre, je le vois chaque jour, à tout instant. Il est mon vis-à-vis. Aujourd'hui, nous sommes en été. La chaleur accable l’atmosphère. Ses volets ouverts tels des grands yeux fixés sur mes propres fenêtres me regardent sans gêne. Inondé par le soleil, son visage de façade m’observe souvent, on dirait qu’il m’espionne. Mais de quoi je me mêle ? Je ne suis pas venue ici pour être épiée de jour comme de nuit. Il doit entendre mes murmures car sans tarder je remarque qu'il se fige sous la lumière qui l’irradie. Il n’en peut plus je le vois bien, on dirait que les tuiles de son toit étincellent de colère. Les rambardes sculptées juste devant ses vitres crient de soif tandis que sa peinture déjà ancienne n’en finit plus de pleurer.
L’immeuble devant ma fenêtre s’ennuie tout le temps. Indolent, il appelle à son secours le beau mois d’août. Les touristes vont et viennent, les oiseaux s’en vont puis reviennent, mais lui, immobile, se lamente souvent de ne pouvoir bouger. Il est 13 h 05 minutes à ma montre, je le vois maintenant qui s’endort avec moi, tout repu de la saison chaude. C’est l’heure de sa sieste ou bien est-ce la mienne ? Je ne sais que répondre. Placé toujours bien en vue, lui et moi, on devient bons amis.
L’immeuble devant ma fenêtre, quand le soir commence à tomber, baille jusqu’à fermer ses yeux. Il s’étire comme un enfant. C’est à ce moment-là que je lui dis bonsoir, il me sourit alors du même sourire triste que le mien. Nous deux, toujours ensemble, à vivre nos heures invariables. Unis dans la monotonie.
Mais voilà qu'après ma sieste, depuis deux bonnes heures environ, tout a changé. Des travaux de ravalement sont entrepris par la ville. Il était temps. Au nombre de fenêtres fermées, je vois qu’il s’y préparait sans doute depuis un bon moment. Je ne me doutais de rien, j’avais pensé que les locataires étaient partis en vacances. Non, finalement, c’est eux qui m’ont informée du début des travaux. Je viens de les rencontrer. Voilà pourquoi mon ami l’immeuble frimait depuis deux jours dès que je l’observais. J’avais remarqué l’air énigmatique qu’il prenait dès que je m’interrogeais à propos des grosses plaques de fer posées depuis peu juste devant lui. Maintenant, j’ai la réponse : c’étaient les échafaudages placés là par les ouvriers en vue du futur chantier.
L’immeuble devant ma fenêtre n’est plus tout à fait le même. Il est fier, si fier, si vous pouviez voir sa façade arrogante. On dirait qu’il montre ses bras gouttières par un : « C’est moi ! c’est moi ! C’est pour moi ! Na na na na nère ! ». Quel drôle de bâtiment. Il se comporte comme un enfant. Enfin, je préfère le voir ainsi plutôt que de le sentir pris dans les filets de la mélancolie. D’autant plus qu’il a la fâcheuse tendance à m’entrainer avec lui dans ses baisses de moral. Je suis ridicule d’ailleurs, que me font après tout les humeurs de ce compagnon que je n’ai pas choisi ? C’est peut-être à cause de ma propre solitude. Nous avons cela en commun tous les deux.
Les échafaudages sont d’un bavard, c’est incroyable ! Pour le coup, il doit se sentir moins isolé mon ami de pierre et de crépi. Oui, je souris. Tiens, justement, au moment où j’écris, il me regarde de nouveau. Il est tout joyeux. Je sens qu’il aimerait partager son bonheur avec moi. J’aimerai le suivre jusque-là mais mon cœur est lourd. Les ravalements de façade, j’en ai connu plus d’un, les changements d’apparence, de lieux ou de voisinage, j’en ai vécu plusieurs. Sur le moment, on est tout enivré d’allégresse. Puis, doucement, la régularité méthodique des jours sans surprise reprend le dessus. Quoiqu’il arrive, on est toujours avec soi. Mon ami devine mes pensées, j’ai l’impression qu’il cherche à me tendre les bras pour un câlin improvisé. Peine perdue. Plus tard, peut-être, quand j’aurai dormi, quand la fatigue qui ne me quitte plus jamais m’aura un peu lâchée, à ce moment-là sans doute, je pourrai partager son enthousiasme pour la nouveauté.
L’immeuble devant ma fenêtre l’a bien mérité. Je ne le jalouse même pas. Chacun a droit a sa part de bonheur. Quoi de plus normal ? Il est sans cesse devant moi, jaune pâle, immense, sans attrait. Il n’a rien pour attirer les regards. Cependant, je vous assure, dans les villes peuplées de cœurs solitaires, tout est possible, y compris d’avoir pour seul ami les murs d’une habitation placé à tout jamais devant nos yeux.
"On ne voit bien qu'avec le coeur" (St Exupéry) Cette musique si célèbre, qu'elle en est devenue monotone, a une allure tout à fait nouvelle grâce au talent de la musicienne. C'est un peu comme mon immeuble : Il semble banal, mais, avec un regard neuf, tout peut changer.
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L'immeuble
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Texte court terminé ! Merci à Deogratias. |
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