Je me laisse aller - Poème

Je me laisse aller

Tant d'années passées auprès de toi

Tant d'années à rêver de je ne sais quoi

Le bonheur transpire, se déchire en un cri

Perçant mes tympans déjà meurtris

Et puis après les larmes s'invitent

La gorge serrée,  les mains tremblantes

J'ai parfois l'impression que mon corps lévite

Tellement ce cauchemar me hante

Je me laisse aller à croire que mon destin

Se résume à toujours être abandonné

Par ma mère, ma femme et tous les saints

Qu'un jour dans ma vie j'ai eu la poisse de rencontrer

Je me laisse aller, je suis au fond du trou

Mes souvenirs ne valent plus un clou

Je me laisse aller, je tombe sans cesse

Dans un précipice ou mes peurs renaissent

Tant d'années perdues auprès de toi

Tant d'années vécues sous le même toit

Et puis après un vide immense

Une fissure béante dans mon cœur

Des mots trop forts, une évidence

Qui apparaît dans l'ombre de mon malheur

Et ce silence, ce silence si intense

Qui se faufile, se glisse lentement

Au creux de mes veines, dans mon sang

Parcourt toute ma chair en souffrance

Je me laisse aller, je sombre sans combattre

Je me laisse aller à ceux qui veulent m'abattre

Je dis à tous ceux qui veulent ma peau

Tirez sans sommation, je suis sur le carreau

Tant d'années à te voir faire n'importe quoi

Tant d'années à chercher un peu de joie

Et puis après, le cœur gros, je me lasse

Des non-dits, des insultes, des menaces

J'aimerais retrouver la fille que j'ai épousée

Mais elle est loin, si loin aujourd'hui

Trop loin pour que je puisse la rattraper

Et le temps, lui, n'attend pas et s'enfuit

Je me laisse aller, je me laisse couler

Sans réagir, j'aimerai mourir

Je me laisse aller, mes rêves ont sombrés

Dans les dédales de nos soupirs

Je me laisse aller, je n'ai plus la rage

Pour affronter toute ces ignominies

A tous ceux qui me disent  "il faut du courage"

Merci bien mais gardez au chaud votre empathie 

Je me laisse aller, je tire ma révérence

L'esprit léger, l'âme sans défense

Je me laisse aller par manque d'envie

Tout commence et se finit...

Tant d'années à observer un mirage

Tant d'années à éviter ce naufrage

Je me laisse aller, je suis déjà mort

C'est triste à pleurer mais j'accepte mon sort

Je ne peux plus rien y faire, c'est immonde

Je me laisse aller, mon avenir est retors

Cruelle est la conclusion mais ai-je eu tort

D'avoir voulu protéger mon monde ?

Tant d'années à errer, à me poser des questions

Tant d'années à espérer qu'il y ait une solution

Et puis après c'est l'habitude

Le loup est prisonnier de sa cage

N'a plus d'ambitions, se couche par lassitude

N'a plus la force de tourner les pages

Je me laisse aller à croire que ma vie

N'a aucune valeur, aucun intérêt

Je me laisser aller à regarder ces photos jaunies

Qui me rappelle que l'on s'est aimé

Je me laisse aller, la solitude m'oppresse

J'ai perdu le fil, la clé de mon allégresse

Je me laisse aller, je broie du noir

La lumière éteinte par désespoir

Je me laisse aller, je me fous de tout

Et je me laisserai aller jusqu'au bout