Connexion : supprimer Ou

Correspondance George Sand & A... - Domaine Public

Domaine Public "Correspondance George Sand & A. de Musset" est un texte du domaine public mis en ligne par "George Sand".Vous voulez partager avec la communauté de DPP, un texte appartenant au domaine public. C’est ici !
Chacun peut ressentir l'envie de faire découvrir les œuvres de certains auteurs.
Alors n'hésitez pas à le faire, les auteurs et textes à découvrir seront mentionnés sur votre profil.

Venez publier un texte du domaine public ! / Protéger un texte du domaine public

Page : Lire Précédent 1 2 3 4 5 6 Lire la suite

1833 - Liaison amoureuse avec Georges Sand.


Plus sensuelle que passionnée, Georges Sand ne partage pas l’amour exalté que lui voue Alfred de Musset. Leur liaison orageuse atteint son paroxysme à Venise, en 1834, où la romancière, qui entretient une liaison avec le docteur Pagello, tente de convaincre Musset qu’il est entrain de devenir fou. Après des mois de crise, de ménage à trois, puis de séparation, une réconciliation s’amorce. Mais Musset, dans une lettre écrite de Baden, montre que ses sentiments n’ont pas évolué comme sa maîtresse le souhaitait. La réponse de George Sand (cf.page suivante) rend la rupture inévitable.

Musset évoquera ce drame amoureux dans Nuit d’octobre. (pour la lire : http://www.de-plume-en-plume.fr/histoire/nuit-d-octobre )




Alfred de Musset à George Sand
Baden, 1er septembre 1834  



Voilà huit jours que je suis parti et je ne t’ai pas encore écrit. J’attendais un moment de calme, il n’y en a plus. Je voulais t’écrire doucement, tranquillement par une belle matinée, te remercier de l’adieu que tu m’as envoyé, il est si bon, si triste, si doux : ma chère âme, tu es un cœur d’ange. je voulais te parler seulement de mon amour, ah ! George, quel amour ! Jamais homme n’a aimé comme je t’aime. Je suis perdu, vois-tu, je suis noyé, inondé d’amour: je ne sais plus si je vis, si je mange, si je marche, si je respire, si je parle: je sais que je t’aime. Ah ! si tu as eu toute ta vie une soif de bonheur inextinguible, si c’est un bonheur d’être aimée, si tu ne l’as jamais demandé au ciel, oh ! toi, ma vie, mon bien, ma bien-aimée, regarde le soleil, les fleurs, la verdure, le monde ! Tu es aimée, dis-toi, cela autant que Dieu peut être aimé par ses lévites, par ses amants, par ses martyrs ! Je t’aime, oh ma chair et mon sang ! Je meurs d’amour, d’un amour sans fin, sans nom, insensé, désespéré, perdu ! Tu es aimée, adorée, idolâtrée jusqu’à en mourir ! Et non, je ne guérirai pas. Et non, je n’essaierai pas de vivre ; et j’aime mieux cela, et mourir en t’aimant vaut mieux que de vivre. Je me soucie bien de ce qu’ils en diront. Ils disent que tu as un autre amant. Je le sais bien, j’en meurs, mais j’aime, j’aime, j’aime. Qu’ils m’empêchent d’aimer !

Vois-tu, lorsque je suis parti, je n’ai pas pu souffrir, il n’y avait pas de place dans mon cœur, je t’avais tenue dans mes bras, ô mon corps adoré ! Je t’avais pressée sur cette blessure chérie ! Je suis parti sans savoir ce que je faisais : je ne sais si ma mère était triste, je crois que non, je l’ai embrassée, je suis parti, je n’ai rein dit, j’avais le souffle de tes lèvres sur les miennes, je te respirais encore. Ah ! George, tu as été tranquille et heureuse là-bas. Tu n’avais rien perdu. Mais sais-tu ce que c’est pour un pauvre cœur qui a senti pendant cinq mois, jour après jours, heure par heure, la vie l’abandonner, le froid de la tombe descendre lentement dans la solitude, la mort et l’oublie tomber goutte à goutte comme la neige, sais-tu ce que c’est pour un cœur serré jusqu’à cesser de battre, de se dilater un moment, de se rouvrir comme une pauvre fleur mourante, et de boire encore une goutte de rosée vivifiante ? Oh, mon Dieu, je le sentais bien, je le savais, il ne fallait pas nous revoir. Maintenant c’est fini : je m’étais dit qu’il fallait revivre, qu’il fallait prendre un autre amour, oublier le tien, avoir du courage. J’essayais, je tenais du moins. Mais, maintenant, écoute, j’aime mieux ma souffrance que la vie : vois-tu, tu te rétracterais que cela ne servirait à rien, tu veux bien que je t’aime, ton cœur le veut, tu ne diras pas le contraire, et moi, je suis perdu. Vois-tu, je ne réponds plus de rien. (…)

Écoute, George; plus rien, je t’en prie, pas un mot pour me dissuader; pas de consolation, pas de jeunesse, de gloire, d’avenir, d’espérance, pas de conseils, pas de reproches. Tout cela me fait penser que je suis jeune, que j’ai cru au bonheur (…); tout cela me donne envie de pleurer, et je n’ai plus de larmes. (…) Ne me dis pas que je t’écris dans un moment de fièvre ou de délire, que je me calmerai, voilà huit jours que j’attends un quart d’heure de calme, un seul moment pour t’écrire. Je le sais bien que je suis jeune, que j’ai fait naître des espérances dans quelques cœurs aimants (sic), je sais bien qu’ils ont tous raison; n’ai-je pas fait ce que je devais? Je suis parti; j’ai tout quitté . Qu’ont-ils à dire? Le reste me regarde. Il serait trop cruel de venir dire à un malheureux qui meurt d’amour, qu’il a tort de mourir. (…) Tu vois que je souffre, tu pleures avec moi, tu me laisses emporter de douces illusions; tu me parles de nous retrouver; tout cela est bon, mon ange, tout cela est doux (…). Mais j’aurai beau regarder ma porte; tu ne viendras pas y frapper n’est-ce pas? Tu ne prendras pas un morceau de papier grand comme la main, et tu n’écriras pas dessus: viens! – Il y a entre nous je ne sais quelles phrases, je ne sais quels devoirs, je ne sais quels évènements, il y a entre nous cent cinquante lieues. Eh bien, tout cela est parfait, il n’y en a pas si long à dire. Je ne peux pas vivre sans toi, voilà tout.(…)

Ô ma vie, ma vie, je te serre sur mon cœur, ô mon George, ma belle maîtresse ! mon premier, mon dernier amour !




Partager

Partager Facebook

Auteur

George Sand

02-08-2012

Lire Précédent Lire la suite
"Soyez un lecteur actif et participatif en commentant les textes que vous aimez. À chaque commentaire laissé, votre logo s’affiche et votre profil peut-être visité et lu."
Lire/Ecrire Commentaires Commentaire
Correspondance George Sand & A. de Musset n'appartient à aucun recueil

 

Tous les Textes publiés sur DPP : http://www.de-plume-en-plume.fr/ sont la propriété exclusive de leurs Auteurs. Aucune copie n’est autorisée sans leur consentement écrit. Toute personne qui reconnaitrait l’un de ses écrits est priée de contacter l’administration du site. Les publications sont archivées et datées avec l’identifiant de chaque membre.