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Bourricot - Scénario ou Pièce de théâtre

Scénario ou Pièce de théâtre "Bourricot" est un scénario ou pièce de théâtre mis en ligne par "J.L.Miranda"..

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SCENE XI

 

BOUR, RICOT

 

Comme dans la première scène, au début de la pièce, Ricot contemple le tableau qui représente une femme sortant de son bain. Bour revient sur scène par la porte latérale.

 

RICOT (contemplant le même tableau qu’au début de la pièce)Tu me trouves l’air con, Michel ?

BOUR – Non, pas vraiment. Je dirai plutôt un amant déçu qui, sur le corps d’une femme nue, contemple l’horizon vide de son existence.

RICOT – Je lui aurais donné la prunelle de mes yeux. Que veux-tu ? J’étais si heureux de fréquenter une femme positivement différente des autres.

BOUR – Ah ! positivement différente ?…

RICOT – Oh ! quand elle en avait envie, elle était toute amour ; un plaisir majuscule se soumettait à la magie de ce rituel dont elle était la prêtresse unique ; elle qui me plongeait dans une sorte de béatitude. Après l’amour, je ne voyais que des anges à mon chevet.

BOUR – Tu es un peu trop sentimental. Tout amant passionné croit naturellement que sa maîtresse est exceptionnelle. Jusqu’au jour où il retrouve l’usage de la raison.

RICOT – Ça m’a brisé le cœur de la voir partir, tout de même. Cholis est venu la chercher, personnellement. La plage arrière de la limousine était jonchée de roses.

BOUR – Un vrai enfant de salaud, ce vieux briscard ! Avec quel cynisme il manipule les gens ! Et dire que nous avons été amis.

RICOT – Ça fait mal au cœur. Ce vieux gaga bourré de Viagra nous a bien eu tous les deux.

BOUR (éclatant de rire)Tu as mordu à l’appât, et maintenant que tu l’as avalé, tu sais que l’hameçon fait mal. Moi, je me suis fait à la trahison féminine par le biais du dégoût.

RICOT – Ça me reste quand même en travers de la gorge. Mon cœur crie vengeance, mais je suis trop lâche pour lui faire du mal.

BOUR – Je suis bien placé pour comprendre ce que tu ressens, mais n’exagérons rien. Arlette se chargera de nous venger. Cholis maudira le jour où il s’est amouraché d’elle. Va voir ton ex-femme et tes enfants en Touraine, ça te changera les idées.

RICOT – En Touraine ? Qu’est-ce qu’elle fait en Touraine ?

BOUR – Elle est partie avec Henriette. Tu la connais, Henriette?

RICOT –  Elle ne m’a rien dit, la salope. Elle part avec les enfants sans même me prévenir ? (Un temps)  Henriette… Claudine ne jurait que par Henriette.

BOUR – Elle m’a chargé de te donner ses coordonnées. Elle revient dans un mois. D’ici là, si tu veux aller les voir…

Après un moment de silence pendant lequel ils se regardent comme animés par la même pensée, ils éclatent de rire.

RICOT – Ha ! ha ! ha ! C’est marrant ce qui nous arrive !

BOUR – Moi, je te pique ta femme, tu me piques la mienne ; on s’engueule, on s’en veut à mort ; et voilà qu’Henriette m’enlève ma maîtresse, Cholis t’enlève la tienne. Au bout de l’histoire, nous n’avons plus ni femme ni maîtresse. Ha ! ha ! ha !

RICOT ( les larmes aux yeux) – C’est quand même malheureux d’en arriver là.

BOUR ( plein d’attentions pour son ami) – Eh, regarde-toi ! On dirait un collégien amoureux largué par petite amie.

RICOT Tu ignores ce qui est l’amour, le vrai.

BOUR – Ne fais pas cette tête ! Un peu de cran, mon vieux ! Le ciel ne va pas s’écrouler. Je te garde mon amitié, je suis là pour te remonter le moral.

RICOT– Et ce fameux voyage que tu allais faire, comme un avant-goût de la future lune de miel ?

BOUR – J'ai proposé une croisière dans les Caraïbes à ma fiancée, elle a préféré la Touraine. Je viens de te le dire. Je crois qu’elles vont se mettre en ménage, Henriette et Claudine. Ça t’étonne ?

RICOT – On aura tout vu.

BOUR – Ah, qu’ils sont naïfs les clowns ! Après la farce du « bourricot » que tu m’as jouée sous ce même tableau, je me suis pris à te regarder autrement. Je t’admirais presque pour tout dire. Et pourtant, j’ai l’impression que tes oreilles ont encore poussé.

RICOT – Tu veux dire que je suis devenu « bourricot » à moi tout seul ? J’en conviens. Ma conduite n’a pas été très intelligente.

BOUR – As-tu jamais vu une femme mûre s’éprendre d’un homme rien que pour ses beaux yeux ? Quand elles dépassent la quarantaine, l’âge romantique est loin derrière.

RICOT – Elles veulent surtout s’assurer une ménopause confortable ?

BOUR – Elles rêvent toujours d’amour, bien entendu. Mais, pour qu’il soit encore plus beau, elles le préfèrent comme une perle rare enchâssée dans un chaton d’or.

RICOT – Ce ton désabusé, cette persistance à noircir les sentiments. Quel cynisme !

BOUR – L’expérience m’a beaucoup appris sur la nature des femmes.

RICOT – A tel point que tu es devenu misogyne. C’est bien ça? L’amertume t’a rendu misogyne. (haussant le ton tout à coup) Au fond, ça te plaît qu’Arlette soit tombée dans les bras de Cholis ?...

BOUR – Peut-être bien. Je comprends mal qu’un homme de son intelligence puisse commettre une erreur pareille. Pendant les derniers mois de campagne, il traînera sa maîtresse comme une cloche sonnant sa défaite.

RICOT – Je crois qu’il est question de mariage. Mais nous allons avoir de plus amples informations. Voilà Arlette qui revient.

 

Arlette paraît sur le seuil de la porte du fond et s’approche des deux hommes.

 


SCENE XII

Les mêmes, ARLETTE.

 

ARLETTE – Dépêchez-vous de quitter les lieux. Le propriétaire arrive, je dois lui remettre les clés de la maison.

BOUR – Prenons quand même le temps de nous dire adieu. Laisse-moi te dire que j’ai signé tous les papiers concernant le divorce tant attendu.

ARLETTE – Mon avocat m’en a informé. Enfin, tu es devenu raisonnable.

BOUR – Tu n’as pas attendu la proposition que j’avais à te faire, concernant notre avenir. Après le divorce on pourrait s’aimer, tout en vivant chacun de son côté.

ARLETTE – J’ai trouvé bien mieux.

RICOT – Es-tu contente de ta nouvelle situation ? C’est à peine si je réalise ce qui m’est arrivé.

ARLETTE –  Hier encore, je ne savais pas où j’allais ; maintenant, je peux faire des projets d’avenir. Je suis désolé pour toi, Jean. De toute façon, nous n’aurions pas été bien loin. La vie que nous serions obligés de mener ne me convenait pas.

BOUR (à Ricot) Ne te l’avais-je pas dit ? Où est l’amour dans l’histoire ? Une ménopause confortable, voilà ce qu’elle cherchait.

ARLETTE – Ne sois pas déplaisant, Michel ! J’ai supporté avec toi plus qu’une femme normalement constituée peut endurer.

BOUR – Parle encore de la glace qu’il me fallait pour relancer la mécanique ; dis que je suis impuissant tant que tu y es. Cholis a les joues roses, mais il ne te comblera pas. Tu le tromperas avant que les fleurs du mariage n’aient eu le temps de se faner. Et moi, je rirai à gorge déployée.

ARLETTE – Tu es ignoble, je te méprise !

RICOT – Et nous, qu’allons-nous devenir, Michel ?

BOUR – J’ai réservé deux places en première classe pour une croisière aux Caraïbes.

ARLETTE – Ah ! ça ne va plus avec Claudine ?

BOUR – Deux invertis de sexe opposé ne sont pas faits pour s’entendre, madame. (se retournant vers Ricot) Je disais donc que j’ai retenu deux places pour une croisière. Je te propose de prendre la place de Claudine.

RICOT – Tu ne penses quand même pas que…

ARLETTE – Si, si, on ne saurait être plus clair. Il paraît que ces croisières sont propices pour de nouvelles expériences érotiques.

BOUR – N’écoute pas ce qu’elle dit ? C’est une proposition honnête, a priori.

RICOT – A priori ?

BOUR – Je ne te demanderai rien, je veux juste que tu me tiennes compagnie. Cela dit, tu es libre de refuser.

RICOT – Encore heureux ! Laisse-moi réfléchir un peu. Une croisière aux Caraïbes, c’est tentant comme le diable déguisé en femme, mais il y a une inconnue de taille : le petit plan crapuleux que tu as dans le crâne.

BOUR – Nous aurons une cabine de luxe avec vue sur le large. Nous disposerons d’une baignoire, de la télé, du téléphone, et on nous servira le petit-déjeuner au lit.

RICOT – Ô, c’est la vie de château dans un palace flottant. Mais, aurais-je le cœur léger à ce point, après la déconvenue sentimentale dont j’ai fait les frais ?

BOUR – Bien entendu, si une attirance physique venait à se manifester, il ne nous resterait alors qu’à sauter par-dessus les tabous.

ARLETTE – Nous y voilà ! Tu sais à quoi t’en tenir, Jean.

RICOT – Quinze jours à débrider mes tendances sexuelles refoulées… (il imite tant bien que mal la démarche et les manières d’un homosexuel) Va pour les Caraïbes, Michel. Ce sera la croisière de ma vie. Et quand est-ce que nous partons ?

BOUR – A l’instant, mon petit cœur, les bagages sont prêts.

RICOT – Je deviendrai peut-être quelqu’un d’autre en voyageant dans les mers chaudes. Si l’envie me prend de changer de bord, ce sera le départ d’une nouvelle aventure.

Ricot décroche le tableau et s’achemine vers la porte latérale suivi par Bour. Arlette disparaît par la porte du fond.

RIDEAU

Fin de la pièce

 

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Auteur

J.L.Miranda

23-07-2017

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Bourricot appartient au recueil Théâtre

 

Scénario ou Pièce de théâtre terminé ! Merci à J.L.Miranda.

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