Mr Turner - Critique de Film, Théatre, série...

Mr turner,

la tête dans les images et le pinceau à la main...

         Mr Turner, la tête dans les images et le pinceau à la main, l'âme imprégnée de spiritualité et la chair pénétrée de bestialité, est savamment incarné par Timothy Spall. La relation du premier nommé avec son père se traduit par des dialogues d'une simplicité affectueuse et des grognements heureux, par des étreintes et des mines complices. Leur complicité atteint son paroxysme devant une table chargée d'une tête de porc. Flanqué d'une gouvernante, heureuse de sa soumission docile aux actions qu'il lui ordonne et satisfaite de sa vassalité envers un homme prisonnier de ses instincts lubriques, Mr Turner peut à loisir immerger ses yeux dans l'élégance aveuglante de Dame Nature. Il tâtonne d'une canne blanche les formes et les couleurs et voit sa quête picturale aboutir à des chefs d’œuvre. A la mort de son père, il cherche un ersatz de tendresse dans des simagrées de catin, mais il trouvera l'amour dans un gîte familial. Mike Leigh, le réalisateur, malgré quelques digressions inopportunes qui alourdissent le film, peint à merveille les sentiments qui étreignent les personnages de cette œuvre biographique. La jalousie de la gouvernante envers Mrs Booth, la propriétaire d'une pension de famille, quand elle découvre sa liaison avec l'homme qu'elle aime en secret, à laquelle le cinéaste donne une dimension masochiste et pathétique, en est une des parfaites illustrations. « La peinture est un poème silencieux », entend-on dire dans un film où la transmission émotionnelle atteint son acmé dans la scène finale lorsque Mr, Turner, avant de plonger dans la nuit éternelle lance : « Le soleil est Dieu ».